Le Temps des Découverts ~ Les Jeunes Terres

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Les jeux des marins se trouvèrent rapidement interrompus par l'arrivée de la garde de nuit. Pas le temps de mettre en place d'autres paris, il fallait déjà se relayer. Les soirées s'enchainaient sans se distinguer. Après le passage du Détroit des Marchands, la mer avait été suffisamment calme et généreuse pour permettre une traversée sans trop d'encombres. Il y avait bien eu des tempêtes qui avaient mises à rudes épreuves les compétences des marins ; quelques rencontres chanceuses avec des navires marchands, qui, en échange de quelques fonds, fournirent les explorateurs en vivres supplémentaires ; des tensions à l'idée d'apercevoir un navire pirate ou une redoutable silhouette de monstres marins sous les flots. Mais rien d'impossible pour les téméraires marins de Shoan. Les meilleurs, se disaient les hommes non sans fiertés pour s'encourager. Hélas, certains, trop vieux ou trop faibles, avaient quittés ce monde sur le trajet. On les avait remis à l'Océan, laissant les flots et la Divinité emportaient leurs âmes en des mers plus calmes et moins dangereuses. Après des mois de traversées, la fatigue, l'air iodé et la diminution apparente du stock de nourriture commençaient
à effrayer même les plus hardis des hommes. Ils avaient beaux êtres entraînés et vaillants, l'idée de ne peut-être jamais pouvoir rentrer chez eux ne les enchantaient guères. Fort heureusement, la discipline toujours exemplaire des habitants de Shoan, et leurs fidélité quasi religieuse à l'Empereur écartaient bien des risques de mutineries. Quand bien même, si ces dernières étaient évoquées, ne serait-ce même que par plaisanterie, les Officiers se faisaient un devoir de corriger les impertinents. Plus le temps s'allongeaient, et plus les barbes et les cheveux le suivaient. Beaucoup des hommes auraient pût devenir méconnaissable si les navires n'avaient pas avec eux forgerons et artisans du métal pour aiguiser les rasoirs. Et quand les rasoirs ne pouvaient plus êtres sauvés, les couteaux prenaient le pas. Et quand ces derniers abandonnaient à leurs tours, les nobles katanas affrontaient autres choses que des monstres ou des ennemis. Beaucoup se coupèrent et y laissèrent quelques morceaux de joues. On les appelait rapidement "les Borgnes Joues".

Et un jour, finalement, au lever d'un matin que l'on ne connaît plus, le cri le plus attendu de toute l'expédition se faisait entendre.[/i]

"Terre ! Terre en vue !!!"

[i]Tout l'équipage se précipitait alors à l'avant de la proue pour apercevoir le premier les Jeunes Terres. Et quelle n'était pas alors la ferveur, l'immense joie qui s'emparait d'eux. L'objectif de tout un voyage, l'ultime but pour certains, se profilait enfin. Ceux encore en état de le faire entamaient une danse joyeuse et presque enivrés. Les plus téméraires n'hésitaient pas à ouvrir le dernier tonneau de saké, même de la cave personnelle du capitaine, pour fêter cela de manière arrosée. Les chants raisonnaient déjà dans les airs.

Les Jeunes Terres étaient enfin là.

Lui, de son côté, il ne profitait pas de la fête. En qualité de Mage de l'Eau, il avait une mission bien particulière. Il était suspendu par un habile système de corde à la surface de l'eau. L'eau, qui était tellement claire, tellement pure, tellement belle, qu'elle reflétait parfaitement le ciel tel un miroir. Quand les marins se décidèrent à le réaliser, ils se demandèrent s'ils n'étaient pas en train de voler. Mais non, lui pouvait parfaitement le proclamer. Il avait une oreille sous la surface et les yeux clos dans une concentration extrême. Il écoutait ce que les courants marins et les remous lui renvoyait. Il faisait dans sa tête une carte topographique parfaitement détaillée du fond des mers. Les coraux, les poissons, les crustacés et les rochers, rien ne lui échappait. Puis il finit par faire signe de la main et on le remonta. Quand il atteignit de nouveau le pont, un marin lui rendit ses petites lunettes qu'il posa sur son nez, pinçant ce dernier. Shoukaku, la Musicienne, Mage du Vent, se présentait à ses côtés.

"Alors ?
- Déjà des dizaines de poissons inconnus.
- Je voulais dire pour accoster.
- Bien sûr j'y arrive. Les récifs sont assez profonds pour que nos bateaux ne risquent rien, mais nous devront tout de même faire preuve de prudence. Sur les pointes que j'ai vu, il y a des amas rocheux, très dangereux.
- Nos navires sont à fond plat, il n'y a pas moyen de remonter les rivières pour s'enfoncer dans les terres ?
- Non, pas avec ceux-ci en tout cas.
- Très bien, vas faire ton rapport alors. J'attends ton signal pour lever à nouveau le vent."

Et Riku la quittait pour se présenter au chef de toute l'expédition. Ce n'est que quelques minutes après qu'elle reçut le signal pour lancer une dernière rafale de vent qui allait rapprocher les navires de la côte.

La terre qui se présentait à eux était grande, on perdait facilement de vue son horizon. Impossible de déterminer pour l'instant s'il s'agissait d'une île ou d'un nouveau continent. Il n'y avait également, pour l'heure, aucune preuve ni trace d'activité humaine. Une épaisse jungle, principalement de palmiers et de yukas, s'étendait à perte de vue après une plage de sable fin, aux reflets quasi d'or. Les navires s'approchaient doucement et quand Shoukaku ne pouvait plus assurer une allure respectable, les rames prirent le relais. Les tambours résonnaient doucement sur un fond d'ambiance tropicale. En réponse à ces tambours, des oiseaux chantaient et des singes rieurs lançaient leurs signaux de détresse. Certains marins commençaient même à se demander s'ils n'avaient pas atterrit par mauvais hasard à Mandrosa tant les sensations étaient similaires. Ces derniers étaient rapidement remis à l'ordre : La Musicienne ne commet jamais une seule erreur quand il s'agit de guider les vents. Ceci était bien les Jeunes Terres.

~ Zärfell vécut le voyage sans trop de remous internes, malgré quelques creux où sa femme, ses enfants et ses amis lui manquèrent... Il alternait ses obligations de marin non-professionnel avec des moments de méditations profondes durant lesquelles il se reconnectait à l'immensité de l'océan et du ciel. Dans ces moments-là, le voyage jusqu'aux terres inconnues et la longueur de ce dernier disparaissait de son esprit. Sa quintessence magique roulait alors sur tout Pandore, prenant des sortes de nouvelles du monde via les voies de la magie mystérieuse. Il était alors assis en tailleur, quelque part sur le pont, dans un retrait total de l'action qui l'entourait et des bruits autour de lui. Ces instants de déconnexion, il y travaillait depuis tant d'années maintenant que cela était devenu une routine pour lui ; une routine qu'il pouvait pratiquer n'importe où et en n'importe quelle circonstance.

Le magicien tenta tant bien que mal de garder une apparence décente, en coupant ses cheveux et sa barbe avec son athamée, comme il avait l'habitude de le faire quand il partait pour de longs voyages à travers Pandore. Il fut néanmoins bien content d'aller de temps à autres quémander à Mikasa de bien vouloir affûter sa pauvre lame, histoire de ne pas avoir une barbe de six mètres de long. Zärfell évita de justesse de se tailler une joue, évitant ainsi de rejoindre le camp de ceux qui s'étaient hélas louper quelques fois. Après tout, il avait déjà une cicatrice qu'il n'appréciait pas plus que cela, pas la peine d'en rajouter une autre ! Cette expédition sur l'eau fut pour lui une occasion de mieux connaître la forgerone et son caractère, d'en faire presque une camarade de combat en laquelle il avait toute confiance, car, après tout, les longs voyages consolident les amitiés. De plus, le jeune homme tenta de maintenir le bien être des troupes grâce à ses pouvoirs magiques et, aussi, ses talents de cuisinier. Il ne voulait pas que les hommes et les femmes de la mer finissent avec le moral dans les chaussettes. Il s'en fit presque une ligne de conduite durant tout le reste du périple ! Bizarrement, il ne désespéra jamais de voir un jour poindre une terre devant eux. Il avait foi en la bonne étoile de la Divinité.

Les quelques mots "terre en vue" le firent bondir. Ce matin-là, son cœur ne fit qu'un tour. Il arrêta ce qu'il était en train de faire pour les découvrir, enfin, ces Jeunes Terres... Et il les vit, l'esprit surexcité, impatient ! Le Mage, quand il découvrit ces nouveaux reliefs, ne put retenir un lent sourire de satisfaction et de joie ! Une satisfaction et une joie au goût unique, celle d'être l'un des premiers explorateurs d'une terre totalement inconnue... Tandis qu'ils s'approchaient doucement, Zärfell se doutant que les Mages Arc-en-ciel devaient être en plein branle bas le combat, il décida d'approcher de la proue. Le magicien respira à plein poumon le parfum de l'inconnu. Ces terres, qui se perdaient dans le longtemps, lui inspirèrent des envies d'exploration subites... Il regarda Mikasa :

- Incroyable ! Nous y voilà enfin Mikasa !

Zärfell partit aider à la manœuvre avec énergie et entrain ! Il s'assit et rama avec tout le monde au son des tambours. Il exécuta les mouvements qu'ils devaient faire et le rythme qu'ils devaient tenir. C'était un exercice physique mais essentiel pour conclure l'approche des Jeunes Terres. Le cul contre le bois, le jeune homme fit travailler ses bras. Enfin, il y eut un dernier coup de tambour et les bateaux s'arrêtèrent. On finit, une fois la distance jugée optimale, par jeter les ancres des navires. Le Mage ne quitta son poste qu'une fois les bateaux parfaitement immobilisés. Bien vite, il s'organisa sur le pont un rassemblement et des instructions par les chefs de l'expédition. Zärfell s'exila un peu car, en bon Mage, il voulait sonder ce que cette terre pouvait lui dire. Harmattan l'avait suivi tout du long et fit de même quand il s'approcha de la proue. Doucement, il ferma les yeux et fit abstraction de la vie autour de lui...

Le silence se fit bien vite dans son âme. Il se concentra et essaya de voir ce que la magie et son sixième sens pouvaient lui révéler comme information invisible aux yeux et aux autres sens... Peut-être d'autres formes de magie ou des émanations d'énergie étrange, inconnue, qu'il ne pourrait pas identifier mais qu'il pourrait croiser pour la première fois. Peut-être des infrasons, des énergies et tout le monde invisible qui parcourait ces terres. Peut-être, aussi, qu'il verrait des animaux et des plantes inconnues, des reliefs inconnus eux aussi. Bref, il voulait recueillir ne serait-ce qu'un pourcent d'informations qui pourrait lui être utile. Néanmoins, avant tout, cet exercice était pour lui l'occasion de saluer ces terres inconnues et de s'en imprégner comme pour en avoir moins peur. Il espérait que cela ne fasse pas comme les terres de Marie Higgs, où, alors, il n'avait rien senti de particulier.

Dans son dos, l'organisation s'activait et, sûrement, le débarquement n'allait pas tarder.

Le trajet avait été presque aussi long que Mikasa l'avait calculé. Mais pour elle, une Esper, le temps qui passe ne voulait pas dire grand chose. Étant un être de quasi pure-magie, les ravages du temps n'avaient eu aucun effet sur elle, contrairement à tous les autres membres d'équipages. Elle avait profité de ce voyage pour faire plus ample connaissance avec Zärfell, en plus de rattraper le temps perdu avec ses anciens camarades. Et avec tout cela, c'est comme si elle avait toujours été amie avec le mage. Durant le voyage, le vieux Xi avait était de ceux qui ne terminaient pas le voyage. Il disait partir en laissant son navire aux soins de la forgeron, qui le connaissait maintenant mieux que personne d'autre. Son dernier souhait était aussi qu'une fois arriver, le navire soit désossé pour servir à construire les futurs habitations des colons de l'Empire. Cela serait plus ou moins sa tombe. Il avait été difficile de négocier avec le Capitaine pour obtenir cette faveur, car après tout, le navire était réellement propriété militaire de l'Empire. Il avait tout de moins était décidé que les parties facilement remplaçables soit utilisés à cette fin. Au final, cela contentait Mikasa.

Elle prenait donc soin du navire quand le cri le plus attendu de tout le voyage tombait à ses oreilles. Se relevant de ses fonctions, l'Esper souriait en passant une main sur le bois de la cale qui grinçait encore sous l'effet de la houle. Elle murmurait qu'ils étaient arrivés.

Elle se précipitait ensuite sur le pont et voyait elle aussi, de ses yeux ébahis, l'horizon tropical face à eux. C'était donc vrai, les Jeunes Terres étaient là, à portée de main ! Prise de la même joie et du même engouement que tout les marins, elle criait de joie en sautant sur place. Elle et Ryoujô s'enlacèrent dans une franche et amicale étreinte, comme pour se féliciter de la réussite du travail de toute une vie. Elle répondait à l'affirmation de Zärfell par un sourire radieux.

"On a réussi ! Je peux pas le croire !"

C'était peut-être la meilleure sensation depuis la réussite de son premier katana. Elle souhaitait que ce plaisir dure éternellement, mais le temps n'était pas aux célébrations. Hâtivement, elle rejoignait tous les autres marins dans les manœuvres délicates de débarquement. Ces terres n'avaient après tout aucun port, aucun dock pour permettre aux bâtiments de l'Empire d'accoster. Mikasa n'était pas marin, mais comme tout soldat de l'Empire, elle avait assisté aux manœuvres de la Marine lors des grandes reconstitutions et simulations de batailles qui formaient le point d'orgue des entraînements des soldats de Shoan. Alors elle allait ramer avec les autres, se fiant au rythme des puissants tambours. Quand l'ordre de s'arrêter fut donner, elle grimpa sur le pont et se rassembla avec les autres. Se mettant tranquillement en rang auprès de ses camarades, elle attendait les instructions à venir. Aucun doute que chacun allait avoir son rôle dans les actions à suivre.

L'aventure sur les Jeunes Terres et la colonisation de ces dernières ne faisaient que commencer.

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Plusieurs minutes s'étaient écoulées depuis le rassemblement des hommes sur le pont. Il était difficile de communiquer entre les navires, mais cela était nécessaire pour mettre au point le futur de l'expédition. Comme sur les terres pleines de reptiles, il fallait être prudent. Heureusement, le guidage de RIku, le Mage Arc-en-Ciel de l'Eau, aidait dans tout ça. Après des instants qui semblaient éternellement long pour les marins et explorateurs impatients de mettre pied à terre, les capitaines des différents navires se présentèrent à leurs hommes. Les instructions étaient maintenant claires.

"Chers enfants de l'Empire ! Nous y sommes ! Nous sommes les premiers arrivé ! Ce qui veux dire que nous avons une responsabilité envers tous les futurs arrivants ! Vous le savez, le voyage a été dur, et nos vivres commençaient à manquer. Le voyage retour ne sera pas pour tout de suite, alors je vous invite à faire ici comme si c'était chez vous ! Bien, nous allons donc débarquer par groupes sur ces plages et installer des constructions importantes pour l'avenir. Je ne veux que personne ne s'éloigne seul dans la jungle, on ne sait pas ce qui nous attend là-bas."

Dans le même temps, le sondage magique de Zärfell lui revenait enfin. Il y avait une très légère présence de magie sur cette île, mais difficile d'en connaître la source. Elle semblait enfoncer de manière éparse dans les profondeurs de la jungle, un peu comme des fleurs. Le capitaine du navire de Zärfell et Mikasa se raclait la gorge.

"Maintenant n'oubliez pas une chose : nous sommes loin, très loin de nos maisons et nos familles. Si une décision doit-être prise, elle est celle de l'Empereur. Vous avez tous compris où je voulais en venir ?"

Et oui, effectivement. Le temps que le navire messager retourne à l'Empire, et que les ordres eux-mêmes ne reviennent ici... Il faudrait au moins un an et demi. Durant tout ce temps, les explorateurs étaient livrés à eux-mêmes.

Plusieurs instants plus tard, tout le monde, à part la garde des navires, étaient débarqués sur le sable blanc des plages. L'ambiance était tout à fait tropical. Les plus motivés coupaient déjà les palmiers pour en obtenir le bois. D'autres s'hâtaient à ramasser pierres et brindilles pour faire des feux ou des installations pour l'instant sommaires, tels qu'un distillateur d'eau ou un métier à tisser. On choisissait également les branches les plus robustes pour construire des pilotis et des bases de bâtiments marins. Rapidement, les fondations d'un port militaire de l'Empire prenaient formes.

~ Le jeune homme laissa le retour de son inspection lui revenir. Il sentit cette présence magique, sous forme de fleurs, lointaine et enfoncée dans la jungle, résonner en lui... Il y avait donc bien quelque chose de magique ici. Bien sûr, il était extrêmement curieux de savoir de quoi il pouvait bien s'agir, tout comme de découvrir de quelle nature pouvait être tous les animaux et toutes les plantes inconnues qu'il avait pu sentir. Quand il rouvrit les yeux, en voyant ces terres, il eut déjà la sensation qu'elles lui étaient un peu moins mystérieuses. Être doté d'un sixième sens changeait souvent le rapport à l'inconnu. Le Sylphe se tourna vers Harmattan et lui déclara :

- Je crois que ce monde nous réserve bien des surprises. Je suis impatient de découvrir peut-être de nouvelles formes de magie, pas toi ?
- Hum, si, mais j'avoue être un peu méfiante, répondit la quadrupède.

Puis, ils partirent écouter les instructions. Il se remémora le temps qui s'était déjà écoulé et pensa à ses enfants... Il faudrait qu'il leur envoie une trace magique, pour leur dire qu'il pensait à eux. Cela mettrait du temps à arriver, mais il tenait à le faire. Néanmoins, le temps fut bien vite au débarquement discipliné des hommes et femmes de l'Empire. Quand enfin, le jeune homme toucha pied à terre, il releva la tête avec un grand sourire. Il observa le sable d'or et la densité de la jungle en face de lui. C'était en son sein que semblait être caché cette petite source de magie qu'il avait senti et cela attisa d'autant plus son envie d'aller découvrir de quoi il s'agissait. Cependant, en voyant les troupes s'activer, le magicien se souvint qu'il n'était pas venu seul. Il était venu avec toute une expédition d'hommes et de femmes, et il devait bien se plier à la discipline exemplaire de l'armée impériale. Alors, même s'il se savait plus libre que certaines personnes ici, il mit la main à la pâte, tout naturellement. Il coupa des palmiers à l'aide de sa magie et forma des sortes de poutres afin de construire les premières habitations. Aux côtés de Hikato, il construisit plusieurs bâtisses. Cela prit plusieurs jours et Zärfell prit sur lui en écoutant les énièmes aventures et espoirs de gloires du chasseur de Shoan. Le Vétéran était trop occupé à aider aux installations pour penser pleinement à ce que cette terre pouvait renfermer. Pour l'instant, les côtes semblaient sûres. Ils ne subirent aucune attaque féroce, hormis quelques animaux qui semblèrent rôder ou observer, depuis l'épaisse jungle, le remue-ménage de ces étranges bipèdes et de leurs navires accostées.

Entre deux constructions, Zärfell prit enfin le temps d'aller voir Riku et Shoukaku, pour se renseigner sur ce qu'ils avaient pu apprendre de leur côté vis à vis de cette terre. En effet, la grande activité de ces derniers jours, depuis leur arrivée, les avaient empêché de faire une véritable réunion de magiciens. Un soir, un peu plus d'une semaine après leur débarquement, ils purent enfin se retrouver tous les trois. Autour d'un feu, les puissants Mages s'assirent sur des rondins de palmier, un peu à l'écart des autres. Il formait un trio d'où émanait une importante aura magique pour quiconque était capable de sentir cette énergie. Zärfell fut le premier à parler et évoqua ce qu'il avait ressenti en arrivant :

- Je pense que vous l'avez tous les deux sentis, mais il y a une trace magique sur cette île. Je les ai vu sous forme de fleurs, très discrètes, au cœur de cette jungle. Je pense que la magie ne doit pas être trop prégnante ici, néanmoins, la question reste de savoir si sa réelle puissance est dissimulée par quelque chose ou si la trace magique est effectivement faible.

Riku acquiesça et poursuivit :

- Tout juste, Mage Zärfell. De mon côté, j'ai recensé de nombreuses espèces animales inconnues. Comme vous vous en doutez, leur nombre n'a fait que croître au fur et à mesure de mes inspections.

Il évoqua les différentes formes animales qu'il avait pues "voir". Cette île semblait notamment peupler de reptiles inconnus, mais aussi d'animaux se rapprochant de félins, de canidés ou de volatiles hybrides. La magicienne de Vent enchaîna ensuite avec les reliefs de ce lieu qui semblait très étendu.

- Je n'ai pas réussi à estimer précisément la taille des Jeunes Terres, mais elles pourraient bien être un véritable continent.

Riku acquiesça de nouveau, très concentré, tout comme le Sylphe qui continua :

- Je n'ai pas eu le sentiment que la magie ici soit reliée à l'immense réseau de Pandore et c'est peut-être pour ça qu'on a jamais senti la présence de ces terres avant. En tout cas, j'ai l'habitude de me connecter à toute la magie qui court dans notre monde et je n'ai jamais senti l'énergie qui vit ici. Si vous voulez mon avis, je pense que la trace faible que l'on a senti n'est qu'une chimère. Je pense qu'une magie plus puissance se terre ici, au cœur des ces Jeunes Terres, et il faudrait pouvoir la suivre pour se rendre à son foyer originel. C'est mon opinion.

Les deux Mages Arc-en-ciel approuvèrent les propos de leur confrère. Shoukaku rappela tout de même, malgré leur très forte envie à tous les trois, qu'il leur faudra suivre les instructions prochainement prises concernant l'exploration de ces lieux. Mais leur réunion permit de confirmer à tous les trois qu'il y avait bien quelque chose de mystérieux sur le plan magique. Zärfell avait concilié dans son carnet de notes toutes les informations fournies par Riku concernant la faune et la flore et toutes celles de son homologue de vent concernant le relief et l'étendu de ces Terres. Ils durent se séparer, car leur devoir respectif les appelait. Les deux Mages de l'armée devait rejoindre les chefs d'expédition concernant des décisions à prendre pour l'avancée de l'expédition. Zärfell, lui, rejoignit Mikasa parmi les soldats qui jouaient aux cartes et s'occupaient sur le temps de repos du soir. Le Vétéran de guerre n'était pas encore de garde, alors il en profita pour se joindre à l'ambiance décontractée en toute discrétion. Il y avait peu d'alcool, car celui du long voyage était quasiment entièrement consommé, alors chacun se lançait des paris concernant ce qu'il ferait sur ce qui était pour eux et elles toujours une île.

- Moi, lâcha Hikato, je paris un de mes katana que je serai le premier à tuer un animal encore jamais tué et à le ramener à Shoan. Avec ça, ma réputation de chasseur hors paire sera définitivement reconnue. Et vous, Zärfell, qu'est-ce que vous pariez ?

Le jeune homme fut surpris d'être aussi vite remarqué.

- Je ne paris rien du tout, déclara-t-il sans détour, je n'aime pas ce genre de jeu stupide.
- Haha !, lâcha le chasseur. Vous êtes vraiment rabat-joie parfois, ou plutôt je dirais un peu vieux jeu.
- C'est parce que je dois être un Mage qui ne pense qu'aux vieux bouquins, répliqua le magicien avec ironie.
- Exactement, appuya Hikato. Ce doit être ça ! Allez, et toi, Mikasa, qu'est-ce que tu paris ?

Et la suite des discussions tourna autour de ces paris idiots, dans lesquels les marins noyaient à la fois leur impatience et leurs appréhensions concernant cette grande inconnue...

Le lendemain, Zärfell apprit des Mages Arc-en-ciel qu'une expédition importante s'était décidée hier. Mais le plus notable fut l'information suivante : les chefs souhaitaient qu'il soit de la partie, tout comme Mikasa. Shoukaku apprit au jeune homme que les chefs reviendraient rapidement vers ceux et celles qui avaient été retenus pour faire partie de cette expédition. Et cela ne se fit pas tarder : dans la journée même, les retenus durent se retrouver dans le bâtiment des chefs d'expédition. Mikasa et lui n'étaient pas les seuls à être présents, il y avait aussi le Vice-Capitaine Kenshin, Ryoujô et Hikato. Devant l'air grave et très sérieux des chefs d'expédition, personne ne broncha. Le ton était solennel et l'objectif très clair : cartographier une première partie de la jungle.

- Au nom de tout l'Empire, votre mission est de dessiner une première carte des lieux. Il y aura quatre groupes qui partiront dans quatre directions différentes. Chacun sera sous la houlette d'un des Officiers de l'armée et vous devrez suivre à la lettre les instructions.

Zärfell et Mikasa, ainsi que Kenshin et Ryoujô se retrouvèrent dans le même groupe, celui qui allait plein sud. Il s'agissait d'un groupe d'hommes et de femmes assez importants, sûrement car on comptait beaucoup sur lui pour apporter de nombreuses informations. Hikato, quant à lui, faisait parti d'un autre groupe plus petit qui se rendait moins loin, direction l'ouest des Jeunes Terres. A la suite de cette réunion, où ils apprirent que le départ était pour dans moins de trois jours, le temps de tout peaufiner, le chef qui gérait le groupe du magicien vint jusqu'à lui :

- Mage Zärfell, nous aimerions vous avoir parmi nous afin que vous nous couvriez avec votre magie et, aussi, que vous puissiez soigner ceux et celles qui seront blessés. Votre puissance magique sera un appui crucial pour le bon déroulement de cette mission de cartographie. Néanmoins, au vue de votre "position", si vous me permettez de le formuler ainsi, j'aimerais qu'un de nos soldats veille sur vous. Voici Aisu Kuro, un de nos meilleurs soldats, discret, efficace, qui assurera votre protection.

Le jeune homme resta de marbre. A vrai dire, il l'avait senti venir et cela ne l'étonnait quasiment pas... C'était comme sur les terres de Marie Higgs, où on lui avait foutu un soldat au cul. Mais il prit sur lui, ne voulant pas mettre mal à l'aise ni l'Officier, qui avait sûrement reçu des instructions très officielles dans le dos du Mage, ni ce grand soldat aux cheveux coupés en brosse, avec sa peau légèrement bronzée et sa carrure de militaire, avec ses deux katana et son armure bien lustrée. La seule chose qui étonnerait toujours le Mage, c'était qu'on lui demandait d'assurer la défense et le soutien, ainsi que le soin, des troupes, mais qu'on lui collait toujours quelqu'un pour faire, pour lui-même, ce même travail de défense et de protection qui lui incombait.

- Ravi de vous rencontre Aisu Kuro.
- C'est un honneur de vous servir, Mage Zärfell, et le grand soldat s'inclina, très droit. J'ai beaucoup entendu parlé de vous.
- Ah bon ? Eh bien, les bruits courent vites, déclara-t-il pour rire et détendre l'atmosphère.

Ils prirent le temps de discuter un peu, Kuro étant le parfait exemple du militaire irréprochable. Assurément, on n'allait pas demander à n'importe qui d'assurer sa protection... Le chef de son groupe prit aussi le temps d'aller voir Mikasa et lui expliqua qu'il comptait notamment sur elle pour gérer le matériel du groupe et pour réparer les outils si nécessaire, en plus de ses compétences de soldat, bien entendu. Retrouvant enfin un peu d'air frais, il se dirigea vers Mikasa et la questionna :

- Alors, que penses-tu de cette future expédition ? C'est excitant, non ?

Le jeune homme fit un grand sourire. Lui, il était plus qu'impatient d'enfin partir à l'aventure !

Sur le pont, Mikasa écoutait attentivement les consignes du Capitaine. Même si ce dernier n'aurait plus beaucoup d'autorité une fois à terre, c'était tout de même un Officier de l'Empire, et ses mots étaient ceux de l'Empereur. Alors elle enregistrait qu'il s'agissait bien d'une mission de colonisation et qu'il leur faudrait littéralement survivre le temps qu'une ligne de ravitaillement stable soit établit entre Shoan et les Jeunes Terres. Cela allait être fastidieux, même compliqué, mais ce n'était pas un problème pour elle. En qualité de civile (car elle n'était plus vraiment soldat) elle était parmi ceux qui débarquaient en dernier. Aussi fut-elle tout à fait prête pour la suite de l'histoire, avec un plan bien établit dans sa tête.

Son statut de forgeron lui avait donner plus ou moins le privilège de choisir un emplacement pour son futur atelier et par la même occasion son habitation de fortune. La première partie de son installation était de trouver une source d'eau et de faire du feu, les pierres de feu étant rares pour ces derniers et, non éternelles. Les distillateurs d'eau sommaire, utilisant l'effet naturelle de l'évaporation sur les feuilles de palmiers, n'allait suffire qu'un temps. Fort heureusement, les éclaireurs et les traqueurs de l'Empire avait repéré rapidement une rivière à une demi-heure de marche du camp, et des plans pour détourner l'eau étaient déjà en place. Mais Mikasa n'avait pas le temps d'attendre autant. Forte d'un des seau du navire, elle avait rejoint la rivière et ramenait le récipient entier d'eau. À partir de là, elle avait creusé dans son coin un trou pour mélanger l'eau et les fibres de yuka ou de palmes, de la terre et des cendre obtenus grâce à la pierre de feu qui lui avait été donné au débarquement. Cela lui donnait une base pour toutes ses futurs installations. Aidée par un homme de l'Empire, elle installait rapidement une cabane sommaire, qu'elle se chargeait d'étendre elle-même en une forge tout aussi sommaire. Le tout formait un L, avec des murs en branches installées de manière tressées, puis recouverte de la boue qu'elle avait fabriqué. Si toute la construction de la cabane avait prit une journée, il faudrait une journée supplémentaire au soleil pour que tout cela sèche et devienne solide. Son toit était fait de feuille de pommes de terres mortes et séchées, et son lit de plusieurs branches posaient sur une fondation en bois. Les couvertures de survie de l'armée, emportaient en nombres, servaient à la fois de matelas et de draps. Pour sa forge, il lui fallait essentiellement un fourneau et un souffleur. Elle avait encore une fois fabriqué ces derniers avec de l'argile, plus solide que la boue. Le temps et l'exploration lui avait permis de trouver cette précieuse ressource en amont de la rivière, pas si loin du camp. Pour son souffleur, deux morceaux d'écorce d'eucalyptus, assembler en une croix, suffisait. Elle avait encore une fois confectionner une tuyère et un archer pour actionner une branche qui se chargeait de tourner les palmes du souffleur. Cela lui permettait de chauffer son combustible de manière très efficace, et sans les désagréables ampoules propres à une activation "à la main". Le problème maintenant, était la matière première. Elle pouvait récupérer de minuscules pépites de fer dans la rivière, à peine plus grandes qu'un grain de riz. Mais cela ne suffisait en rien pour faire des armes ou des outils. Alors il fallait recycler le métal des armes ou outils usés pendant la traversée ou la confection du camp. Finalement en une semaine, sa forge était prête.

Le soir concluant cette semaine, elle n'était que de passage près du feu de camps où se reposaient les hommes, épuisés. Elle avait dans les bras un tas de brindilles et de branches qui allait faire office de petit bois chez elle. La demoiselle, après tout, était une des plus grandes consommatrices de bois du port. Aussi, la demande de paris du chasseur ne la fit que rapidement détourner de son trajet.

"Le plus grand chasseur de l'Empire semble ivre avec seulement le fond d'alcool qu'il lui reste ? Honte sur vous. Quant à ce que je paris... Je n'ai pas grand chose à vous offrir, si ce n'est une réparation gratuite sur une de vos armes. La source de mon paris est la suivant : il va pleuvoir dans les deux jours à venir."

Et elle s'en allait rejoindre son installation. Le lendemain, une légère pluie battait sur les côtes de l'île.

C'était sous cette petite pluie que le rassemblement pour la première longue expédition de la troupe s'était déroulée. Mikasa, en plus de ses compétences de soldat, allait donc devoir servir de soutien logistique et matériel. Cela signifiait pour elle de se mettre immédiatement au travail dans sa forge afin de garantir un équipement adéquat. La Divinité seulement savait combien de temps il leur faudrait pour cartographier l'île. Le cartographe choisit pour son groupe semblait être un débutant dans le domaine, un jeune homme prénommé Aomine. Il réalisait son Service Militaire Obligatoire depuis le début de l'aventure, c'était donc un Kohai, comme elle avait été. Cela la fit sourire, en quelque sorte.

Quand Zärfell la rejoignit, elle était déjà dans sa forge, à travailler le métal. Le bruit singulier du marteau qui frappe le fer chaud se faisait d'ailleurs entendre régulièrement sous le rideau de la pluie. Il fallait rentrer dans sa cabane pour rejoindre sa forge. Plusieurs poteries séchaient près du feu, et cinq paniers tissés par elle-même remplis de charbons étaient posés dans un coin de l'unique pièce. Il faisait plutôt sombre là-dedans, les seules lumières étant celles des deux feux, l'un près du lit, et l'autre devant elle, dans le fourneau. Au mur de cette petite forge, des crochets et des étagères improvisés servaient à suspendre son matériel et entreposaient les outils ou armes qu'elle avait fabriqué. Plusieurs morceaux d'écorces séchaient en face d'elle. Elle prévoyait d'utiliser cette dernière pour couvrir son toit et en augmenter la perméabilité. Qui savait combien les pluies pouvaient être violents ou non ici ? Un énorme champignon en forme de coupe, découvert par les botanistes de l'expédition, lui servait de fontaine pour son eau. Elle y trempait rapidement le métal chaud quand nécessaire. Les manches attachés dans son dos, elle frappait une dernière fois la pointe de lance sur laquelle elle travaillait avant de répondre à la question du jeune homme.

"Excitant ? C'est tout à fait le mot." Dit-elle en trempant la pointe de lance dans l'eau. Un grand nuage de vapeur émana de cette action. "Mais je regrette que ce ne soit pas une promenade de santé. Tant que nous n'aurons pas une ligne de ravitaillement sûre avec le continent, nous sommes cantonner à des expéditions, vous et moi." Elle posa la pointe sur une des étagères et s'essuya les mains pleines de sueurs, de poussières, et de charbons avec un morceau de tissus déjà bien sale.

"Je vous offre quelque chose ?"

Elle désignait d'un geste de tête une autre étagère où quelques pains rassis et poissons séchés attendaient d'être déguster. Malheureusement, elle n'avait pas assez de sels pour sécher sa viande et le fumoir dehors, qui attendait encore d'être terminé, était inutilisable sous une pluie pareil. Il fallait donc éventuellement se contenter du petit repas du pauvre, en attendant que les chasseurs et les cueilleurs reviennent de la jungle.

~ La remarque de Mikasa concernant la ligne de ravitaillement fit hocher la tête à Zärfell. En effet, il fallait absolument qu'ils y parviennent s'ils souhaitaient vraiment installer une véritable colonie viable. En attendant, il devait continuer de se contenter de ce qu'ils trouvaient dans les eaux et les alentours et il devait vivre dans des bicoques de fortune qui, cependant, au bout d'une semaine, avaient déjà l'apparence de véritables maisons communes. Le jeune homme avait eu de la chance, autant du fait de son "statut" que de ses compétences, il avait pu avoir une petite chambre individuelle. Dedans, il y avait installé un lit sommaire, fait de plantes séchés, de feuilles de palmier et d'une couverture de l'armée. L'essentiel restait surtout le bureau et la chaise, faits en bois, où il passait une bonne partie de son temps. La fenêtre lui donnait une vue assez sympathique : la mer et un morceau des Jeunes Terres. De plus, on l'avait installé dans le quartier des hauts placés de l'armée et surtout, dans le même coin que Riku et Shoukaku.

Adossé à l'encadrement de porte de la forge de Mikasa, il observa son amie travailler tout en écoutant ses réponses. Il pouvait sentir la forte chaleur du lieu et contemplait toutes les installations de sa camarade. Il l'observa plonger la lame dans l'eau avant de la déposer sur une étagère. Zärfell accepta volontiers l'invitation de son amie. Il s'attabla avec elle et mangea les restes de poisson et de pain qu'il y avait. Cela était amplement suffisant pour un casse-croûte. Le Sylphe passa une main dans ses cheveux blancs rendus un peu poussiéreux par la vie rudimentaire du camp. Il croqua dans un petit morceau de pain avant de regarder la jeune femme.

- Tu fais un sacré travail, hésite pas à m'appeler si tu as besoin d'aide ou de quoi que ce soit d'autre. Si je suis pas partie en exploration dans la jungle, tu sais où me trouver.

Effectivement, si le trentenaire n'était pas, soit en train de filer un coup de main ou de soigner des soldats, soit en train d'explorer les lisières de la forêt pour récolter des informations sur ces Jeunes Terres, il était forcément dans sa chambre. Il admirait le travail que faisait Mikasa depuis leur débarquement ici. Il poursuivit la discussion avec quelques considérations :

- Ah, on m'a encore foutu un soldat au cul... Tu sais quoi, même avec le temps, je crois que je m'y ferai jamais à ces histoires de soldat de protection. Il faut toujours que j'ai quelqu'un pour veiller sur moi. Pas que je ne respecte pas les soldats qu'on m’attribue, et celui-ci, un certain Aisu Kuro, a l'air fort respectable, mais j'ai jamais supporté l'idée d'avoir quelqu'un qui me surveille.

Il soupira à nouveau mais ne dit rien d'autre.

- Au fait, j'ai appris que le cartographe de notre groupe était un tout jeune, un certain Aomine de ce que j'ai compris. C'est super, même si je pense que ça peut être à double tranchant d'avoir un novice comme cartographe. Mais bon, il faut bien laisser les jeunes se faire la main. Qu'en penses-tu ?

A vrai dire, Zärfell avait déjà commencé, avec ses petites expéditions, à cartographier les abords forestiers de la côte où était établie la colonie, même si les distances dessinées n'avaient rien à voir avec l'objectif bien plus important qui leur était attribué dans cette expédition à venir. Tout en discutant avec son amie, il pensa bien entendu à ce qu'il avait à préparer comme matériel et vivres pour cette mission qui s'annonçait passionnante !

Soucieuse du bon accueil de son amis et de son confort, Mikasa installait rapidement une table de fortune. Pour se faire, elle utilisait un morceau du navire de Xi qui lui avait été confié. On pouvait d'ailleurs, en faisant bien attention, encore à l'odeur et au toucher l'air marin du navire, qui avait eu de belles années derrière lui. Le poisson et le pain était servit dans des assiettes en argile, encore une fois, conçu par Mikasa. Des pots servaient de verre. Zärfel n'eut aucun mal à les remplir d'une eau aussi fraîche qu'à la source d'une montagne. Mikasa savourait ce délicieux liquide et soupirait d'extase.

"L'eau des Mages est la meilleure qui soit, quel bonheur !"

Elle observait son habitation, qui ressemblait plus à une cabane de survivaliste qu'à une maison en même temps que Zärfell la complimentait sur son travail et lui proposait son aide.

"Merci pour ton compliment et ton offre. J'ai appris un peu sur le tas. Errer de villes en villages a parfois ses avantages. Heureusement, ces Jeunes Terres ont tout le nécessaire pour ce genre d'installation. À mon avis, il ne faudra pas attendre longtemps avant que des véritables bâtiments à l'architecture de l'Empire ne poussent.
- ÇA TOMBE !!!"

Le fracas d'un palmier qui se déchire et tombe non-loin de la forge se fit entendre. Même sous la pluie, les soldats de l'Empire officiait à la confection du port. C'était quelque peu le paradoxe de la situation : les volontaires comme Zärfell et Mikasa devaient obéir aux ordres des Officiers, mais n'avaient pas à remplir pour autant les tâches qu'étaient la colonisation et annexer ces terres à l'Empire. Ils disposaient ainsi d'une forme de semi-liberté. Au même moment que l'arbre tombait, elle écoutait Zärfell se plaindre sur le soldat qu'on lui avait affecté comme garde du corps. Il était difficile à croire qu'un homme tel que lui devait être protégé, autant par son statut de civil que par sa force magique. Mais ce genre de chose n'était pas exceptionnelle. Elle le lui expliquait, sans pour autant chercher à trouver une excuse à de telles pratiques.

"C'est ainsi, l'Empire et l'Armée se sont toujours fait un devoir de protéger les maillons forts de son organisation et ses personnalités importantes. En qualité d'époux de la Haut Général, j'imagine qu'ils voient cela comme une faveur faites à ta femme. Et puis, sa colère serait égale à sa tristesse s'il t'arrivait quoi que ce soit. Elle pencha la tête de côté pour réfléchir. "D'un autre côté, si cela te dérange d'avoir quelqu'un qui te colle tout le temps, je peux toujours t'aider. Encore une fois, sans être de l'Armée, tu restes l'époux de la Haut Général. Cela devrait te donner le droit de choisir ta garde. Ça peut être moi.

Le temps pour le jeune homme de réaliser et réfléchir à cette proposition, elle enchaînait sur son autre remarque concernant le cartographe.

"J'ai été à sa place tu sais, donc je ne peux qu'apprécier l'opportunité qui lui ait offerte. Le but d'un service militaire pour un Kohaï est de se faire la main, et l'Armée est fervente pratiquante de l'apprentissage par l'erreur. C'est à double-tranchant comme tu dis, mais rassures-toi, il devra sûrement remettre ses plans à un cartographe plus expérimenté, dépêché pour l'occasion. Il se chargera de changer les tracés ou de les faire recommencer.

La pluie cessait doucement de battre sur le toit en feuille. Mikasa regardait le plafond comme pour voir à travers ce dernier si le ciel s'était dégagé.

"En tout cas, les Jeunes Terres ressemblent beaucoup à ce que l'on connaît pour l'instant. J'espère que l'expédition à venir nous permettra vraiment d'en découvrir plus."

~ Le Vétéran acquiesça aux propos de son amie au moment où il entendit l'arbre tomber. Quel bazar depuis plus d'une semaine ! Ça n'en finissait pas d'entendre des troncs tomber toute la journée. Le port qui devait voir la jour devait être à la hauteur de la splendeur de l'Empire ! Pendant toute la semaine, Zärfell avait aidé, comme n'importe quel simple soldat, à couper des arbres, tailler du bois et assembler chaque pièce pour que tous les bâtiments puissent voir le jour. Maintenant que plusieurs bâtiments étaient enfin fièrement debout, il avait quitté les rangs des constructeurs pour celui des soigneurs. Désormais, il ne passait plus son temps à faire voler des rondins dans les airs et débiter des planches de bois à la seconde avec quelques sorts magiques d'eau et de vent.

Le magicien écouta attentivement la remarque de son amie concernant le soldat qu'on lui avait attribué. Il savait qu'elle n'avait pas tord. De plus, Zärfell n'avait pas l'habitude de se plaindre. Pour être plus exact, il ne se plaignait quasiment jamais et, s'il le faisait, c'était vraiment que la chose l'exaspérait ou lui pesait sur le cœur. La remarque de Mikasa lui fit remettre un peu les pieds sur terre et oublier ses plaintes. Quand elle évoqua la tristesse potentielle d'Akane quant à sa perte, le Sylphe marqua une pause et se mit à observer le toit, l'air songeur. Il imagina la scène mais ne préféra pas s'y attarder trop longtemps, encore plus qu'en lui vint à l'esprit l'image de ses enfants... La suite de sa remarque lui fit de nouveau baisser les yeux et revenir sur Mikasa. L'idée n'était absolument pas bête et cela lui plaisait davantage. Il esquissa un sourire et acquiesça : la prochaine fois qu'il verrait l'Officier chargé de son groupe, il lui en toucherait deux mots afin de changer de « soldat garde du corps ». Il trouverait forcément la tournure de phrase qui ferait changer d'avis l'Officier.

Il remplit à nouveau son verre et celui de son ami d'une eau pure à la température idéale. En entendant le bruit de la pluie contre le toit de la forge, il se dit que, peut-être, il pourrait bien chasser les nuages pour faciliter les travaux de construction. Néanmoins, le jeune homme se disait que cracher sur de l'eau potable tombant du ciel, c'était quand même dommage. Il oublia ainsi cette idée et se concentra de nouveau sur la conversation, ne pouvant qu'approuver les propos de son amie concernant le relief et le climat global de ces Jeunes Terres.

- C'est vrai qu'ici, ça ressemble beaucoup à des territoires existants sur Pandore, surtout Mandrosa.

Néanmoins, ses récentes découvertes le firent poursuivre dans un autre sens.

- Mais je peux t'assurer Mikasa que si tu regardes en détail, cette terre est vraiment inédite. J'ai découvert en à peine une semaine d'exploration des espèces animales et végétales encore jamais observées jusque-là !

Il sortit son carnet de notes et se mit à tourner les pages où étaient compilés des dizaines et des dizaines de croquis, couleurs ou noir et blanc, qu'il avait réalisés. Des oiseaux avec des ailes immenses ou bien avec des becs fourchus couleur topaze à reflets mordorés, des serpents à collerettes de plumes multicolores, des tortures entièrement noires... Il y avait aussi des dessins de plantes très précis où l'on pouvait voir les moindres détails du végétal. On pouvait voir des fleurs constituées de milliers de pétales, des fleurs en forme de cloches, des plantes grimpantes phosphorescentes...

- Et j'ai encore fait des récoltes intéressantes ce matin que je dois aller analyser...

Il sortit ses bocaux et ses tubes à essai remplis d'échantillons en tout genre. Mikasa pouvait voir la magnifique récolte bordélique du Mage qui, hélas, était parti pour quelques minutes de délire de scientifique :

- Regarde, ça c'est des fleurs minuscules que j'ai découvert ce matin sous des rochers de sables agglomérés et durcis. Je n'ai jamais rien vu de tel ! Je me demande si elles ont des propriétés pharmaceutiques ou chimiques particulières, hum... Peut-être qu'elle pourrait me servir en alchimie. Je les ai baptisées Minusca Flora, il faut d'ailleurs que j'aille voir tout à l'heure les botanistes et scientifiques pour échanger avec eux à ce propos.

Il tendit son tube de verre à Mikasa où il avait enfermé un échantillon de ces végétaux blancs aux pétales d'une taille vraiment réduite. Dans les autres bocaux, il y avait des extraits de roches brillantes, des écailles de reptiles, des feuilles fines et tortueuses d'une plante inconnue... On aurait dit que tout ce qui était nouveau aux yeux du Mage, il l'attrapait et l'enfermait dans une de ses boîtes pour aller ensuite le décortiquer pour comprendre ce que c'était.

- Au fond, si on regarde globalement, cette terre ressemble à toutes les autres terres de Pandore. Mais si on marche avec le nez collé à tout ce qui passe, on se rend compte des innombrables détails de cet endroit. Et je peux t'assurer qu'il y a vraiment de nombreuses espèces végétales et animales qui restent de véritables découvertes ! Ah tiens, regarde...

Il tendit un petit bocal.

- J'ai trouvé ce minerai étrange hier.

Il ouvrit le bocal et montra une petite roche scintillante que le jeune homme avait dégotée.

- Ça ressemble à une sorte d'alliage au vue des micro-strates métalliques de deux couleurs différentes, là, tu vois, indiqua-t-il avec son petit doigt. Elles ne se voient quasiment pas, attend, avec une loupe, ça sera mieux.

Il sortit sa grosse loupe joliment ornée et montra ses découvertes à la forgerone.

- On peut voir des minuscules strates. Il faudrait que je fasse quelques tests chimiques, voir si c'est bien deux métaux différents. Mais je voulais ton avis là-dessus en tant que spécialiste des métaux, qu'en penses-tu ? Tu penses que ça pourrait se forger si on en trouvait en plus grande quantité ? J'avoue n'avoir trouvé que des traces par-ci, par-là, dans différents roches. Celui-ci, je l'ai extrait grâce à ma magie.

Le morceau que présentait Zärfell était découpé de manière chaotique et il contenait, dans certains coins, encore quelques traces du rocher calcaire duquel il avait été extirpé. Le petit morceau scintillait comme de la neige au soleil et le Mage en déduisait que sa densité devait être importante. En effet, son poids était relativement conséquent pour la petite taille de l'objet. Il espérait que Mikasa puisse lui donner une petite expertise. Sur la table, toutes ses trouvailles étaient désormais étalées dans tous les sens.

Mikasa écoutait les explications de Zärfell, même si elle ne comprenait pas forcément grand chose. De temps à autre, elle buvait une gorgée d'eau. Elle souriait, car face à elle, elle avait l'impression d'avoir un petit frère qui montrait à sa grande sœur les trouvailles qu'il avait fait dans les bois. De mémoire, Mikasa se souvenait qu'il était fils aîné. Difficile donc pour lui de montrer ses découvertes à son cadet. Et d'un autre côté, elle se disait que c'était tout à fait normal que quelqu'un se déchaîne en paroles et explications quand il s'agissait de sa passion. Elle-même était plutôt semblable quand il s'agissait de parler de l'art de son père. Elle posait son verre pour prendre le morceau de calcaire qui lui présentait Zärfell. Voilà qui était déjà plus son expertise. Elle observait tous les recoins de la chose. Il serait facile pour elle d'extraire le matériel de son enveloppe rocheuse, un simple tour au fourneau devrait suffire. D'une pesée rapide de la main, elle sentait que la chose était lourde, pour la petite quantité dont elle disposait.

"Si c'est un alliage naturel, c'est très rare, en tout cas, son poids me rappelle le plomb. Je pourrais le mettre dans mon fourneau pour voir si le tout fond, c'est comme ça que je fais pour récupérer mes grains de fers. Mais ça prendrait un temps, surtout que j'ignore si cela marcherait ou non, tous les métaux ne fondent pas à la même température. En tout cas, c'est une bonne découverte. En forger quelque chose ? Oui, peut-être, certainement même." Elle rendit l'échantillon à Zärfell et se rassit tranquillement au fond de son fauteuil qui grinçait, le tout avec un sourire. "Il n'y a rien que je ne peux pas forger.
- Mikasa, tu es là ? J'entre !"

Ryoujô arrivait dans la forge en baissant la tête, car le plafond était presque trop bas pour lui. Il aperçut l'Esper et le Sylphe.

"Oh tu étais là aussi Zärfell ?
- Ryoujô. Tu viens chercher ta pointe de lance ?
- Oui, s'il-te-plaît ?
- Je l'ai terminé juste avant que Zärfell n'arrive."

Elle se leva et prit la pointe de lance pour la mettre dans un morceau de tissu. Elle fit ensuite le tour de la table et le donna à son ancien camarade de combat.

"Désolée, il faudra que tu vois avec un bûcheron pour la hampe. D'habitude je peux le faire moi-même, mais je manque cruellement de matière première pour l'instant.
- C'est bon, merci, je t'en dois une ! Elle est comme neuve maintenant !"

Le soldat se piqua même le doigt sur la pointe. Mais bien évidemment, pour un homme de l'Empire, ce n'était absolument rien du tout. Il remercia Mikasa encore une fois et prit congé. L'Esper lui faisait un salut de la main accompagné d'un sourire. Puis elle observa Zärfell avant de retourner derrière son enclume.

"Ryoujô m'a rappelé que j'ai encore du travail pour préparer l'expédition. Je ne te chasse pas, mais je pense que tu préférerais faire autre chose que me voir travailler." Dit-elle en riant. Elle prenait plusieurs pointes de flèches usées et les précipitait dans son fourneau, avant d'actionner son soufflet. Rapidement, une chaleur quasi insupportable envahissait la pièce et le front de Mikasa se recouvrait de sueur. Elle attendait encore quelques instants que le métal rentre en fusion, puis fis couler le tout dans un moule en terre cuite.

Les trois jours passèrent à toute vitesse pour elle. En fait, à part pour se ravitailler en nourriture, on ne l'avait jamais vus sortir de sa forge. Même la nuit, si on se rapprochait, on pouvait entendre le bruit du marteau qui frappe le fer chaud sur l'enclume. Avec le peu de matière première dont elle disposait, elle avait réussi à fournir en équipement neuf la petite équipe pour son expédition. Par conséquence, sa pierre à affûter avait malheureusement rendu l'âme. Elle espérait pouvoir en trouver une autre lors de l'expédition d'aujourd'hui. Réuni sur la plage, avec la petite équipe, Mikasa se tenait aux côté de Zärfell, en qualité de nouvelle garde du corps de ce dernier. L'équipe, sous le commandement de Kenshin, était donc prête à partir. Elle recevait les dernières instructions avant de s'enfoncer dans la jungle : atteindre la rivière et partir au sud de celle-ci jusqu'à ce que le soleil soit au zénith. Après de dernières recommandations, le groupe partait en colonne dans la canopée. Cri de singes rieurs et chants d'oiseaux exotiques les accompagnaient alors qu'ils progressaient d'un pas tranquille jusqu'à la rivière. Ici, des hommes s'adonnaient à la construction de plusieurs petits postes avancés et d'une palissade improvisée. Visiblement, le périmètre du port allait s'étendre jusqu'à cette rivière.

Le groupe marchait depuis à peine quelques heures quand Ryoujô leva la voix.

"Le soleil se lève et moi je marche, je marche !
- Je marche dans mes belles montagnes, je marche !
- ..."

Et lentement le groupe se joignait à la chanson que le soldat avait choisit. C'était un chant de marche militaire plutôt calme que tous les soldats de l'Empire ont chantés un jour ou l'autre. Il parlait d'un paysan motivé à rejoindre la capitale pour se battre contre l'envahisseur, mais qui finalement se perdait en observant les paysages de l'Empire. Mikasa, comme les autres, c'était joint à cette dernière avec un sourire plutôt candide. Cela lui rappelait tellement de souvenirs. Même le Vice-Capitaine Kenshin se joignait à la bonne humeur en poussant même la voix légèrement plus fort que les hommes et femmes qu'il commandait.

~ Zärfell écouta attentivement les remarques de sa camarade. En effet, le jeune homme était quasiment sûr qu'il s'agissait d'un alliage naturel, quelque chose de rare, comme elle l'avait dit ! C'était notamment pour cela qu'il avait voulu le lui montrer. Il récupéra l'échantillon et se dit qu'il devait absolument en trouver d'autres pour que son amie puisse tenter de forger quelque chose avec ça. Il sourit à sa dernière parole : le Vétéran se doutait que Mikasa pouvait manipuler le métal comme bon lui semblait. Il rangea l'échantillon quand Ryoujô entra. Zärfell lui fit un petit signe de tête avant de ranger toutes ses affaires dans son sac. Il observa ensuite l'échange verbal entre l'Esper et le soldat avant d'écouter de nouveau sa camarade qui lui disait que le travail l'attendait. Il acquiesça énergiquement :

- Bien sûr, je comprends, j'ai aussi des choses à faire. On se voit plus tard. Bon courage pour la suite de ta journée !

Il la regarda rapidement se remettre au travail dans sa forge, avant de partir en direction de la zone où se trouvait scientifiques et botanistes. Une fois là-bas, il montra ses découvertes et chacun exposa ce qu'il avait trouvé. Ils se mirent à faire quelques tests pour voir comment se comporter chimiquement certains échantillons et ils et elles discutèrent pour savoir quelles plantes étaient vénéneuses ou non, et lesquelles pourraient leur être utiles. Ils passèrent le reste de la journée, jusqu'au repas, à décortiquer leurs trouvailles !

Puis, le soir, après son rapide repas, Zärfell partit s'enfermer dans sa petite chambre pour travailler encore jusqu'à tard dans la nuit. Par sa petite fenêtre, dont les rideaux étaient composés de feuilles de palmiers, on pouvait voir une petite lumière s'échappait par les quelques trous laissés par les feuilles. Les jours suivant, le jeune homme dormit peu. Il voulait s'assurer que chaque membre de l'expédition allait bien et il voulait aussi s'assurer de préparer suffisamment de décoctions et mélanges de plantes pour soigner l'équipe. Il alla rapidement voir Mikasa, qu'il voyait travailler comme une dingue. Il en faisait de même en courant dans tout le campement pour aller voir les scientifiques ou les Mages Arc-en-ciel. Il avait aussi réussi à négocier pour changer de "garde du corps", même si Aisu Kuro avait été conservé comme membre de l'expédition.

La veille du départ, le jeune homme prépara toutes ses affaires et vérifia l'état de son bâton d'alchimie. Il avait aussi participer à la préparation des vivres et des premiers repas des membres de l'équipe. Ainsi, le jour du départ, il se tenait droit comme un piquet, charger de vivres et d'équipements divers, avec son bâton d'alchimie dans la main, le visage rasé car il savait qu'ils n'auraient pas l'occasion de le faire pendant l'expédition. A sa ceinture, on pouvait voir plusieurs flacons en verre vides, parés à être remplis de tous types d'échantillons possibles. Il avait aussi emmener un important carnet de notes et de nombreuses mines de crayons en tout genre pour consigner des visuels de ce qu'il découvrirait. Bien entendu, le Vétéran de guerre avait aussi sa boussole et les quelques bouts de cartes des Jeunes Terres qu'il avait déjà réalisés. Harmattan les accompagnait... Elle avait plutôt les yeux rivés sur la jungle, comme captivée par tous les bruits d'animaux qui lui parvenaient aux oreilles. Zärfell avait jugé bon de l'emmener, après tout, les animaux avaient toujours un sixième sens qui manquait aux bipèdes, en plus d'un odorat absolument exceptionnel et d'une ouïe extrêmement fine.

Le magicien écouta les dernières recommandations avant de se mettre en route comme tout le monde. Il se mit plutôt vers le milieu de la file, afin de pouvoir défendre le plus rapidement possible, autant l'avant que l'arrière, si une attaque surgissait. Le Sylphe se laissa pénétrer par tous les sons de la nature. Sa nature de Sylphe lui permettait d'entendre les sons de ces animaux au-delà du simple qualificatif de bruit : l'homme les entendait se raconter des histoires, se transmettre des informations, se mettre en garde les uns et les autres du fait de leur passage, certains se demandaient qui ils étaient, ce qu'ils faisaient là... Les plantes, de ce qu'il pouvait entendre, étaient drôlement silencieuses. Elles avaient senti leur présence très inhabituelle et le jeune homme connaissait ce silence-là venant des végétaux : ils les observaient avec beaucoup d'attention, comme à l'affût de toutes les actions de leur part. La forêt entière semblait être au courant que, un peu partout, des groupes d'hommes et de femmes mystérieux s'étaient mis en marche entre leur feuillage. Zärfell savait que les arbres savent communiquer entre eux d'une manière exceptionnelle, bien plus vite et intelligemment que les êtres humains. Le vent agitait doucement les feuilles et les branches, ne disant rien d'autre que son murmure habituel. Il pouvait aussi percevoir l'eau courante qui fredonnait sa mélodie pour divertir les cailloux et les plantes. Pour l'instant, rien ne lui paraissait alarmant au cœur de la nature.

Il s'était tellement plongé dans l'écoute de son environnement, le Mage n'avait pas prêté attention à la chanson que chantaient tous en chœur les explorateurs et exploratrices. Zärfell connaissait aussi cette chanson, même s'il se souvenait plutôt vaguement des paroles. Lui préféra rester silencieux, comme pour être à la fois à l'écoute de ses camarades et à l'écoute de la nature et de son Sixième Sens. Il marchait un peu la tête baissée et il décida de la relever pour contempler le paysage de jungle autour de lui. Ils avançaient d'un bon pas en direction du soleil et le jeune homme reconnut un peu cette zone, mais il savait que, bientôt, ils parviendraient dans un espace où aucun autre Homme n'était encore allait...

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Avec discipline et rythme, l'expédition progressait en file indienne à travers la jungle. Botaniste, vétérinaire, cartographe et scientifiques marchaient et travaillaient mains dans la mains pour un grand recensement de ces nouvelles terres. Même si la science sur Pandore n'est pas ce que l'on croit, ces hommes de savoirs mettent un point d'honneur à éclairer certains mystères, comme entre autre, l'apparition mystérieuse de ces Jeunes Terres. Le chant des soldats remplaçait rapidement le calme de la canopée, mais cela ne semblait pas gêner les animaux, comme habitués à ce genre de passage. Aomine tenait en ces mains la grande carte vierge et marquait d'un charbon de bois le moindre emplacement suspect. Ici, un rocher à la forme particulière. Là, la rivière qui se fend en deux branches. Il n'était pas facile pour lui de suivre le rythme, mais le Kohaï faisait son possible. C'était par ailleurs un des seuls à ne pas chanter.

Le Sixième Sens de Zärfell ne lui renvoyait que les images magiques de Shoukakou et Riku, ainsi que des quelques autres Mages moins puissants sur l'île. Les petits points de magie qu'il avait ressenti sur la mer semblait bien plus profond dans la jungle, et tout à fait à l'opposé de la direction de l'expédition. Cependant, la vision globale du monde qu'il avait acquis grâce à son contact avec le dragon de Shoan parvenait à se faire plus précise. Une énorme masse floue se dessinait ainsi loin, très loin de son emplacement actuel, au-delà même des limites de la jungle. Il faudrait encore certainement très longtemps pour que sa vision se stabilise et lui donne de plus grands détails de cette masse flou.

Un perroquet multicolore s'envolait soudainement au passage du géant qu'était le Vice-Capitaine Kenshin. L'Officier de l'Empire écartait de son fourreau une branche épaisse tout en discutant avec les hommes dans son dos. Évidemment, nombres de questions qui n'avait pas encore eu de réponses lui était adressée. Comment allait être appelé cet endroit ? Comment allait être appelée le port qu'ils construisaient ? Allait-il même demeurer ? Faudrait-il se battre si ce territoire devait être conquis ? Beaucoup de ces interrogations restaient sans réponses. Après tout, il n'était que Vice-Capitaine. Il n'avait en rien l'autorité d'un Capitaine ni le pouvoir de décision de l'Empereur. L'oiseau se mettait à tourner autour des hommes en répétant de sa voix presque parodique les questions des soldats.

''Bwaaaaa... Comment s'appellera le pooooooorc ? Bwaaaaa....''

Les hommes rirent et finirent même par trouver l'animal fort sympathique. L'un d'eux essaya même de l'apaiser et l'attirer avec son pain. Mais le volatile, à défaut d'être bavard n'était pas si docile. Il finit même par s'éloigner en répétant inlassablement un son :

"Ban'téwonk ! Ban'téwonk ! Bwaaaaa Ban'téwonk !''

Au même moment, Kenshin levait le poing, ordonnant à l'expédition de s'arrêter. Les hommes s’exécutèrent sans attendre. Puis il ouvrit sa main et l'agita deux fois dans sa direction. Les hommes armés de lance s'avancèrent jusqu'à lui et se mirent en formation. Il se retourna et indiqua à tout le monde de se taire. Le perroquet ne fuyait pas le groupe. Ici, les arbres semblaient bien plus jeunes que le reste de la jungle. Et au loin, devant, il y avait des habitations. Les éclaireurs prirent le devant et disparurent quelques instants. Puis ils revinrent dix minutes plus tard, levant la voix.

"Tout est sûr, c'est abandonné !"

L'expédition reprit la marche. Elle découvrit tout un village abandonné. Les maisons et les huttes étaient soit rongées par la végétation, soit en cendres, soit s'étaient écroulées sur elles-mêmes. La matière première de tous ces bâtiments étaient les branches et les troncs des arbres de la jungle ainsi que des feuilles de palmiers. La plus élaborée et grandes de toutes avaient des murs en boues séchées, un toit ornés de crânes d'animaux et même un fossé autour d'elle. Le Vice-Capitaine ordonnait de fouiller chaque demeure. Il n'y avait ici rien à trouver de valeurs : de la poterie cassée, des tables renversées ou autres. Les hommes choisirent de se réunir au milieu du village pour faire un point sur la situation. De son côté, Aomine, les yeux pleins d'étoiles, marquait avec le plus de précision possible l'emplacement de cette trouvaille. Le géant poussait un soupir en posant son menton sur son poing en signe de réflexion.

"Voilà qui complique les choses bien plus qu'on ne le pense. Des résultats ?
- Non Vice-Capitaine. Tout semble avoir été détruit ou abandonné à la hâte." Répondit un soldat.
- Pas d'ossements aux premiers abords." Continua un autre.
- De toute évidence ce village a connut des combats. Ces démolitions semblent plus récentes qu'anciennes." L'Officier se tournait maintenant vers les hommes de sciences, en quête de réponses. Le plus qualifié pour le rôle n'était pas dans leur groupe, le Mage Arc-en-Ciel Riku ayant été attribué à l'expédition Nord. Mais il savait qu'il y avait d'autres têtes pensantes parmi eux.
- Des avis ?"

~ Zärfell nota mentalement ce que son Sixième Sens lui avait fait ressentir. Cette grande masse floue d'énergie qu'il ressentait l'attirait inexorablement... Il leva les yeux, comme pour la voir "en vrai", mais il savait que cela n'aboutirait à rien. Il resta un moment silencieux face à cette découverte, comme s'il espérait la voir apparaître plus nettement. Mais il savait que cela était aussi impossible à ce stade. Alors, il baissa la tête et se mit plutôt à prêter attention aux nouvelles plantes qu'il croisait. Il dessina quelques croquis de végétaux et suivit surtout le mouvement des scientifiques et botanistes de l'expédition desquels il faisait plus ou moins partie. Soudain, le Vétéran leva les yeux en direction du perroquet. Il esquissa un sourire et l'observa tourner autour du groupe. Le dernier son qu'il prononça l'intrigua et il nota dans son carnet, de manière phonétique, ce que le volatile coloré avait bien pu prononcer. Il aurait bien aimé l'interroger, mais Zärfell savait les perroquets plutôt espiègles et peu prompts à répondre aux questions s'ils avaient décidé qu'ils n'y répondraient pas...

D'un coup, tout le monde s'arrêta et le jeune homme fit de même. Zärfell ne ressentait pas de menace magique, mais il saisit quand même son bâton d'alchimie, prêt à ériger un bouclier pour défendre les soldats... Le retour des éclaireurs rassura plus ou moins le groupe et Zärfell avança de nouveau aux côtés de ses camarades. Ce qu'il découvrit lui fit écarquiller de grands yeux. Un village, ici !? La vision de ce village lui rappela soudain les récits sur l'origine des Grand'Mages, les habitants de son village natal Mirabelle. Ses ancêtres venaient d'une île lointaine et ils avaient vécu dans un zone tropicale, non loin du bord de mer... Néanmoins, il ne ressentait aucune trace magique ici. De plus, il se doutait fort que l'origine des siens ne soit pas une île inconnue mais plutôt une île dans la zone de Mandrosa. Sans attendre, le Vétéran se mit à observer les habitations... Il sortit son carnet et dessina tout ce qu'il voyait.

En silence, le jeune homme fit le tour de chaque maison... Il s'agenouilla et observa les poteries cassées. Elles étaient en terre cuite brute, sans peinture. La plupart des créations n'avaient pas d'ornements. Ou bien, si elles en avaient, il s'agissait toujours de représentation d'animaux ou de végétaux, voire des représentations d'espèce d'esprits magiques. Bref, pour lui, cela évoquait une civilisation païenne polythéiste, assez peu évoluée sur le plan technologique, croyant sûrement en des divinités de la nature. Il récolta de nombreux éclats et essaya de reconstituer plus ou moins différentes poteries sur une table qu'il avait relevée. Il remarqua une anse sur un des éclats et le magicien tenta de l'assembler avec d'autres morceaux de la même couleur... Il reconstruisit assez grossièrement, avec quelques morceaux manquant, ce qui lui rappelait une petite amphore. Il y avait aussi des assiettes et des bols rudimentaires. Il y avait des verres et des tasses. La maîtrise de l'anse était pour lui un élément important, montrant une plus grande finition des objets du quotidien. Zärfell continua son exploration des poteries, réussissant à en reconstituer plusieurs de manière parcellaire. Avec sa magie d'air, il colla entre eux les morceaux qui formaient quasiment des éléments complets. A part de petites amphores, des assiettes et des bols, le magicien ne trouva rien d'autre comme vaisselle, excepté ce qui lui sembla être des couverts en bois. Mais ceux-ci étaient trop abîmés pour qu'il pût voir clairement à quoi ces couverts avaient pu ressembler.

Il détailla aussi les tables qu'il trouvait. Rien d'exceptionnel, juste une planche de bois avec quatre pieds emboîtés... Rien n'était collé ou fixé avec une corde, juste enchâssé grâce à des techniques d'emboîtement. Laissant ses trouvailles sur la table qui lui servait de paillasse d'examen, il partit observer plus en détail les bâtiments. Il remarqua, sur les quelques huttes encore debout, que les ficelles étaient constituées de lianes plutôt fines ou bien de tressage de feuille entre elles. Les maisons étaient vraiment sommaires et, voyant comment la végétation les rongeait, Zärfell en déduisit que ce ne devait pas être des constructions très solides. Il avança jusqu'à la plus grande des bâtisses et toucha la boue séchée. Il la broya un peu dans sa main et en conclut que l'ensemble avait dû être construit il y a un moment maintenant, même si les dégâts semblaient plutôt récents. Zärfell se fit un escalier d'air pour accéder aux crânes qui ornaient la demeure. Les ossements avaient été usés par la pluie et le soleil. Il remarqua ce qui semblaient être des crânes de félins, de grands oiseaux ou d'animaux de la ferme, comme des sortes de moutons ou de chèvres. Sûrement ces crânes avaient-ils pu être installé là suite à des rites funéraires animaliers ou bien suite à une chasse riche en butin ou encore pour honorer les animaux qu'ils avaient tué. En effet, pour le jeune homme, il était difficile de croire à l'hypothèse d'autres explorateurs venus de Pandore. Pour lui, ils avaient en face d'eux des restent d'une présence humaine autre que des vagabonds. Il s'agissait, à ses yeux, d'un réel village d'autochtones et non de potentiels colons. Ce qui lui mettait la puce à l'oreille était notamment ce bâtiment en boue séchée, avec des crânes d'animaux, ou encore les poteries cassées et les meubles. Il redescendit et entra dans cette maison. Il n'y trouva pas grand chose, sinon des bijoux rudimentaires, fait soit en bois sculpté, soit en os d'animaux. Il n'y avait aucune trace de bronze, de cuivre ou de tout autre alliage ou métal, comme de l'or. Pour Zärfell, cette civilisation en était vraiment à un état primaire de son avancée, pour ne présenter que des bijoux en matériau aussi simple. Cependant, il remarqua la finition de ces derniers. Il y trouva des gravures et des plumes ou des morceaux de bois flottant avec des motifs taillés grâce à un couteau, ce qui montrait un certain sens du détail et de l'esthétique. Néanmoins, le reste de l'habitation était vide...

Il ressortit un peu bredouille et alla jusqu'à sa table d'examen. Il déposa toutes ses trouvailles et réfléchit. Il n'y avait aucune trace d'ossements humains, juste des os d'animaux. Il rejoignit le groupe en plein débat et laissa chacun s'exprimer. Ce n'est que vers la fin qu'il décida de prendre la parole :

- A mon avis, ce qu'on a là est une trace de civilisation locale. Je crois difficilement à une hypothèse de colons qui seraient venus ici avant nous. La présence des crânes et de ce bâtiment en boue séché, tout comme les poteries ou les meubles, tout cela me fait penser à une véritable société autochtone. De plus, les éléments qu'on a là ne rappelle aucune autre civilisation de Pandore, que ce soit la nôtre, le Royaume, Gandur, l'archipel de Mandrosa ou encore Erimos. Il n'y a, à ma connaissance, aucune société pandorienne qui met des crânes sur les toits de ses habitations ou qui construit des maisons aussi rudimentaires. Nos sociétés sont bien plus avancées que celle qui se présente à nous.

Zärfell parlait assez sérieusement quant à son hypothèse.

- Mon avis, c'est que la civilisation qui vivait ici n'était pas à un état avancé de développement technologique. Ils n'utilisent que deux système de construction : l'emboîtement et le ficelage avec des matériaux assez simples : des plantes la plupart du temps. Au vu des poteries que j'ai pu reconstituer, dit-il en montrant celles qu'il avait collées grâce à la magie. Elles ne présentent pas une élaboration très importante non plus. Pas de peinture, même si il y a pu en avoir et qu'elle a été effacée, mais j'en doute fort du fait de l'aspect récent des destructions. Pas de vaisselle très sophistiquée, hormis peut-être ces amphores et la technique de l'anse qui est intéressante. Les bijoux que j'ai trouvés sont en bois ou en os d'animaux, que des colliers pour la plupart... Pas de trace de magie. Pas de trace de métaux. De mon point de vue, on est sur une société païenne qui est peut-être équipée d'armes rudimentaires. Et surtout, pas de trace d'écriture, même sur des tablettes en terre cuite.

Il avait exprimé son point de vue. Pour lui, il ne tirait pas des conclusions hâtives et cela tenait la route. Ce qui l'impressionnait ici, c'était le vide de ce village. Etait-ce un pillage qui avait eu lieu ? De ce qu'il avait pu analyser, c'était l'hypothèse qu'il aurait maintenu. Ou alors, un départ précipité dû à une attaque ? Mais une attaque par qui, pour quoi faire ? Il regarda Mikasa qui avait peut-être des remarques à faire. En tout cas, Zärfell avait l'air grave et les sourcils un peu froncés. Il était encore en train de réfléchir à ce qu'ils venaient de découvrir...

Mikasa retrouvait l'énergie de sa jeunesse dans l'armée -avait-elle seulement une jeunesse ?- au rythme du chant et de la marche. Voyager à travers Pandore avec son matériel était quelque chose de sympathique, mais la marche au pas restait une seconde nature pour elle. C'était une seconde nature pour tout habitant de Shoan. Portée par la masse mouvante, elle marchait à une vitesse fixe. Tout autour d'elle respirait la vie et la sauvagerie. Elle ne connaissait pas Mandrosa, mais elle concluait que ce devait être la chose la plus proche qu'elle pouvait voir. Le perroquet qui suivait le groupe était d'une excellente compagnie. Un peu comme un guide, il les accompagnait à travers les arbres et les enchevêtrements de lianes. Elle se mettait sur le qui-vive à l'instant ou Kenshin ordonnait la halte de la troupe. Quelques gestes tactiques en plus, et la formation adoptait une posture défensive en cas d'embuscade. Elle apercevait, difficilement depuis sa place au centre de la file, les silhouettes de maisons. Cela ressemblait à un village. Les éclaireurs disparurent et Mikasa ressentit comme une tension, suivit d'un soulagement. Le retour des hommes et l'affirmation que la place était abandonnée libérait le cœur de bien des hommes d'un poids.

Une fois sur les lieux, l'Esper observait avec autant de curiosité que les autres les restes de la petite communauté. C'était un véritable saccage. Peut-être même un champ de bataille ? L'absence de corps ou d'armes n'allait pas dans ce sens. Les maisons en cendres ou détruites pouvaient laisser entendre un incendie. Celles encore debout avaient été sauvées à temps ? Tellement d'interrogation qu'elle se posait en suivant Zärfell et en soulevant tout ce qu'elle pouvait soulever ; pousser tout ce qu'elle pouvait pousser ; observer tout ce qu'elle pouvait observer. Sous un tas de feuilles et de branches, elle finit par trouver ce qu'elle espérait trouver : une arme. Tout du moins, ce qu'il en restait.

C'était une pointe de lance. Elle faisait quatorze centimètre de long, pour une largeur de six centimètres et une épaisseur d'un centimètre tout au plus. L'absence d'insert laissait entendre qu'elle était attachée à une hampe avec une corde. Elle était d'une couleur noire, presque ébène. La taille était rudimentaire, mais efficace. Toucher l’extrémité avec son index suffit à y faire perler une petite goutte de sang. Elle la tourna et la retourne plusieurs fois, comme pour découvrir d'autres éléments. Mais rien. Il n'y avait non plus aucune présence de branche assez longue autour d'elle pour faire le corps de la lance. Elle glissait l'objet dans sa sacoche. Il faudrait le montrer au Vice-Capitaine quand nécessaire.

Son tour vint rapidement à la réunion au centre du village, car peu de personnes avaient d'idées. Ou si elles en avaient, elles étaient toutes les mêmes. Elle montrait donc la pointe de lance à l'Officier et l'accompagnait de ses conclusions.

Je ne dis pas que c'est la preuve qu'il y a eu un conflit, mais on peut affirmer qu'il y a eut des armes ici. Je n'ai rien trouvé d'autres à ce sujet.

C'était donc une recherche et une fouille plus ou moins bredouille pour l'expédition. Mais après une telle découverte, Kenshin avait décidé que l'expédition devait rebrousser chemin et retourner au camp pour faire son rapport. Le chemin du retour avait était aussi calme que l'aller. Beaucoup plus de bavardages pouvait être entendu, l'excitation ou le frisson de la découverte du village étant dans toutes les bouches. De retour au port, Mikasa avait choisit d'attendre les instructions autour du feu de camp. La nuit était déjà tombé et les ordres interdisaient désormais l'exploration de la jungle la nuit. Le risque d'une attaque était beaucoup trop grand pour mettre en danger la vie des hommes de l'Empire. Mikasa l'acceptait.

~ Le retour au campement général au bord de la mer laissa suite à de nouveaux ordres. Il y eut l'interdiction d'explorer la forêt de nuit qui fit tirer une petite moue au trentenaire. Il aurait volontiers était farfouiller dans la jungle à ce moment-là... Il savait que, la nuit, la nature pouvait se transformer et on pouvait alors découvrir des choses formidables sur le plan de la faune et de la flore. Il n'avait pas pu beaucoup explorer de nuit toutes les parties de la jungle alentours et, désormais, il devrait essayer de se tenir aux règles... Une fois que toutes les troupes eurent fait leur rapport, le jeune homme eut l'impression de n'avoir rien à faire. Le fait de ne pas pouvoir aller plus avant dans la forêt l'agaçait aussi un peu. Il ne pouvait donc pas aller découvrir ce qu'était cette étrange masse d'énergie qu'il avait ressenti. Il soupira et Harmattan le remarqua :

- Toi, ça se sent que tu es contrarié.
- Oui, un peu, déclara-t-il tout en se mettant en route pour la chambre où il logeait. J'aurais bien aimé continué à explorer la forêt plus loin que juste autour de notre camp. L'énergie que j'ai ressenti m'intrigue. J'aimerais vraiment savoir de quoi il en retourne. Tu vois, si on découvrait une nouvelle forme de magie, ça serait formidable. Ça prouverait que l'énergie de Pandore s'exprime de plusieurs manières.

La rinoral, qui marchait d'un pas énergique à côté de son ami, l'écoutait sans trop comprendre son excitation. Vu qu'elle avait vécu avec des Mages quasiment toute sa vie, hormis son temps de vie dans les grandes étendues sauvages et inhospitalières du désert frontalier avec le Royaume, elle comprenait aisément la passion du jeune homme pour la magie. Ce qu'elle comprenait moins, c'était son amour pour les explorations lointaines et risquées. Néanmoins, avec le temps, elle avait fini par se faire une raison.

Les jours suivant, le jeune homme se rendit dans la forêt plus souvent que d'habitude. Puisqu'il ne pouvait plus y aller de nuit, il se contenterait d'explorer le jour. Il récolta de nouveaux échantillons de plantes. Sa chambre, qui lui servait aussi de laboratoire, commençait un peu à déborder... Lors d'une sortie, il tomba sur de drôles de fleurs. La nuit commençait à tomber et Harmattan était pressée de rentrer. Cependant, elle dut s'arrêta quand son ami se stoppa net devant ces fleurs.

- Zärfell, qu'est-ce que tu fais ? La nuit va tomber, on doit rentrer !
- Attends...

Il s'avança un peu plus vers ce fourré et s'agenouilla devant. Ces fleurs ressemblaient beaucoup aux pétunias. Elles avaient une drôle de forme de cloche et étaient de toutes les couleurs. Il remarqua, dans la pénombre, un phénomène fantastique : ces fleurs étaient phosphorescentes, ou plutôt, elles avaient des petites tâches blanches qui, elles, semblaient luire dans la nuit comme les tâches d'une luciole. Il sortit sont athamée et en cueillit plusieurs qu'il mit ensuite dans des petits bocaux. Harmattan, elle, n'en pouvait plus. Elle avait peur des représailles s'ils rentraient trop tard. Elle se doutait bien que son camarade n'en avait pas grand chose à faire, surtout qu'il semblait avoir trouver de quoi retenir son attention pendant de longues minutes. En tenant les fleurs dans ses mains, le jeune homme ressentit une étrange sensation.

- On dirait que ces plantes sont chargées dans une énergie qui me rappelle la magie, mais, en même temps, ce n'est pas exactement ça...

Les oreilles de la rinoral tressaillirent. Ce qu'il disait l'intriguait.

- Comment ça ? Je comprends pas... Moi, je ne ressens rien, dit-il en humant les fleurs détachées et le fourré.
- Oui, c'est comme des petites ondes qui parcourent ma main. C'est quasiment imperceptible mais là, en la tenant, j'arrive à ressentir quelque chose.
- Hum ? Ce sont de drôle de pétunias alors, rit-elle.

Le jeune homme était captivé par sa découverte et il devait absolument tenter de concocter quelque chose avec ces fleurs. Sur sa carte, le Vétéran de guerre traça l'emplacement du fourré. Il se releva d'un coup, la nuit était quasiment totale sous la canopée dense de la jungle, quand un bruit attira son attention. Harmattan l'avait remarqué juste avant et avait déjà la tête levée. Le magicien écarquilla de grands yeux. Au-dessus de lui, suspendu à une liane, il se tenait un drôle d'animal... Un singe à quatre bras, au pelage roux comme le feu avec des reflets multicolores, rappelant la queue des paons. Ce mammifère avait aussi une petite crête rougeoyante sur le sommet de son crâne et de grands oreilles rondes. Il semblait les observer avec espièglerie et amusement, mais aussi curiosité. Zärfell entendit les plantes rirent, apparemment amusées de voir cet animal... Elles semblaient le connaître. L'Erudit s'adressa alors à la créature qui les fixait toujours :

- Salut toi, comment tu t'appelles ? Moi c'est Zärfell.

L'animal continua de fixer, en silence, le jeune homme. Lui et Harmattan l'entendirent juste rire dans sa barbe.

- Amusant, le petit Humain, lâcha-t-il avant de se mettre à rire à nouveau.

Ce fut tout ce que Zärfell eut le temps de comprendre avant que le singe ne disparaisse avec agilité et furtivité, dans les hauteurs des arbres. Il ne put interroger que les arbres :

- Dites vous connaissez ce singe ? … Comment s'appelle-t-il ?

En écho, les arbres lui répondirent qu'il se nommait Sakari.

- Mais qu'est-ce qu'on s'en fiche de savoir son nom ?, s'agita Harmattan. Il faut rentrer rapidement ! La nuit est déjà là.
- Oui, c'est bon Harmattan, on y va.

Le jeune homme resta encore planté là quelques secondes, là où il avait vu ce singe. Il était curieux de le recroiser, mais Zärfell se doutait que cela ne dépendait que de la volonté de ce Sakari au poil roux. Le jeune homme utilisa la douce lueur de son bâton d'alchimie pour rentrer au campement. Il passa par un passage qui débouchait à l'arrière du bâtiment où il savait qu'il ne serait pas repéré. Après tout, l'Erudit avait scrupuleusement étudié le lieu. Certains hommes et les femmes étaient déjà en train de dîner. Avant d'entamer une quelconque étude ses nouvelles découvertes très intrigantes, le jeune homme décida aussitôt d'aller voir son amie Mikasa. Il alla chercher sa ration et celle de l'Esper avant de pénétrer dans l'antre de la forgerone et de la saluer.

- Bonsoir Mikasa, comment ça va ? Tiens j'apporte le repas.

Il déposa leurs assiettes et s'assit à une table. Harmattan s'assit aux pieds de celle et grignoter quelque petits fruits que Zärfell avait récolté. Le jeune homme sortit de sa sacoche deux fruits cueillis dans la jungle et qu'il savait sans danger.

- Alors, la journée a-t-elle était fructueuse ? De mon côté, j'ai fait une belle découverte aujourd'hui.

Il sortit ses bocaux avec ses fleurs et sourit.

- Je crois qu'avec ces plantes, je vais pouvoir concocter de nouvelles recettes de potion atypiques !

Maître du Jeu Messages : 468 X.P : 697

Plusieurs jours s'étaient écoulés depuis la découverte du village détruit dans la jungle. L'ordre de ne pas explorer les lieux la nuit avait entraîné quelques contestations de la part des plus aventuriers et curieux. Mais la consigne était claire. Il était difficile de savoir les intentions de ceux qui habitaient cet endroit ; ni même où ils étaient actuellement. Les expéditions de jours étaient plus ambitieuses et plus régulières, mais toujours réalisées en une journée. L'approvisionnement et la logistique empêchaient de meilleurs résultats. Les soldats de Shoan avaient beau avoir l'habitude des milieux forestiers, ils n'avaient en rien l'agilité de certains peuples dans ce domaine. De plus, des rumeurs envahissaient de plus en plus le camp à propos d'ombres furtives la nuit.

Et c'est un beau jour que deux gardes disparurent.

L'appel avait été concret : deux hommes qui assuraient les patrouilles et la garde du camp la nuit manquaient à la relève. Cette déclaration avait eu l'effet d'une bombe à travers tout le campement et les théories ne manquaient pas pour l'expliquer : attaque animale, esprit de la forêt en colère, enlèvement ou même désertion. Les Officiers les plus gradés n'avaient pas quitté la tente de commandement (presque devenue une maison typique de Shoan désormais) pendant un jour et une nuit entière. Et c'est deux jours plus tard que les évènements s'enchaînèrent à nouveau.

Le soleil disparaissait à l'horizon dans la mer. Sa lumière orange et violette projetait des ombres presque menaçantes sur les habitations de l'Empire. Les hommes commençaient à allumer les torches qui délimitaient la jungle. Le campement s'endormait lentement tandis que les hommes et femmes tombaient dans la torpeur. Les plus fatigués étaient déjà sur le point de dormir. L'un des hommes allumait sa grande lanterne en papier et entamait sa ronde. C'est après seulement deux pas qu'il s'arrêta net. La surprise s'affichait sur son visage. Il reculait jusqu'à atteindre le campement, sans trop savoir quoi faire. Les habitants de Shoan observait sa réaction sans comprendre. C'est alors que, silencieusement, d'autres hommes sortaient de la jungle. Mais ce n'était pas des hommes de Shoan, ni même de n'importe quel autre peuple de Pandore. Ceux-ci étaient grands, fort et imposant. Ils avaient des traits menaçant et un regard de pierre. De longs cheveux noirs tombaient dans leurs dos. Ils portaient des pagnes, des bracelets de cheville et de poignets fait de grandes feuilles vertes. Des bijoux élaborés, constituaient de dents, d'os, de pierre polie et de plumes arboraient le cou de certains. Leurs corps étaient recouvert de tatouages noires à peine perceptible à la lueur de la lune ou des torches. Ils avaient tous une grande lance, dont la pointe les dépassait. Certains possédaient également une sorte de massue ronde et courbée, dont la pierre noire, elle, brillait d'un rouge terrifiant. C'était un groupe d'une douzaine d'entre eux qui se présentait au campement et avançait de manière inflexible.

''Re...Restez où vous êtes !'' Déclarait le garde, essayant désespérément de faire preuve d'autorité.

Les inconnus s'arrêtèrent devant le feu de camp le plus proche. C'est là que l'un des soldats s'aperçut que l'indigène le plus en arrière tenait deux katanas dans ses bras. Les soldats se mirent alors à paniquer, sur le qui-vive. Les lames se dégainèrent dans un bruit clair et les lances menaçaient déjà ceux qu'ils percevaient comme une menace potentielle. C'est l'Officier en charge de l'expédition, le Général Hitsugaya, qui calma le ton de ses hommes. Il faisait reculer tout le monde avant de se mettre en face des inconnus, de l'autre côté du campement. L'Officier expérimenté avait l'habitude des situations tendues. Il regardait celui qui semblait être le chef droit dans les yeux, laissant un silence lourd et pesant envahir les lieux. Le chef avait le visage couvert lui aussi de tatouage.

''Kuaoktémok Kamazo'tz koua ! Mika'ktala Poka-Pawa Aua Wonk ! Ban'téwonk !!!''

Il fit ensuite un grand geste de bras et l'homme à l'arrière se présenta et jeta les katanas au feu. Ensuit, les autres poussèrent un cri en secouant leurs lances et leurs bijoux dans une sorte de danse rituelle menaçante. Le chef reprit la parole.

''Poka-Pawa Kuaoktémok Oooka Kin Uau !'' Il forma le chiffre trois avec ses doigts. Puis l'homme qui avait jeté les katanas se recula et se tint droit comme une statue, posant fermement sa lance dans le sable. Le groupe disparut ensuite dans la jungle aussi simplement qu'il était venu, laissant là cette sentinelle humaine. Tout le monde se regarda sans comprendre quoi faire. Certains voulurent interagirent avec l'indigène, sans aucune réaction de ce dernier. D'autres voulurent simplement le tuer, mais le Général s'y opposa totalement. La question maintenant qui envahissait tout le campement était plus que simple : qui étaient ces gens et que voulaient-ils ?

Mikasa était occupé à cuire des poissons au feu et des patates douces dans la cendre quand Zärfell se présenta à elle. Elle avait pêché et récolter ces victuailles elles-mêmes dans la journée. C'est ce qu'elle répondit à Zärfell avec un sourire quand il lui demanda comment avait été sa journée. Et elle rajoutait :

"C'est tout ce que j'ai fais essentiellement aujourd'hui. Je manque de matières premières alors je ne peux pas forger grand chose. Et tailler la pierre ce n'est pas ce qu'il y a de plus passionnant pour moi."

Elle retournait les pommes de terres avec deux bâtons qu'elle utilisait comme pince pendant que son ami dressait la table. Ils allaient bien manger ce soir. C'était assez exceptionnel. L'installation de la colonie était longue et compliquée. Chacun donnait de sa patte mais il fallait attendre encore au moins deux longues années avant de recevoir les premiers civils de l'Empire qui seront les fondations d'une ville stable.

"Au menu du soir : ration avec ses patates douces et son poisson, je crois que ce sont des anchois. La vie sous-marine, c'est pas trop mon truc non plus."

Dit-elle en riant. Elle prenait la fourchette en bois et le pain et commençait à manger. Pendant ce temps, Zärfell lui présentait des fleurs singulières dans un bocal. Rien qu'elle ne connaissait, mais elle pouvait voir et ressentir en elles, grâce à sa nature d'Esper, une faible signature magique. Elle prenait le temps de les observer tout en essuyant ses doigts dans un morceau de tissu. Elle prenait les bocaux et les retournait dans tous les sens, comme une enfant qui découvrait un nouvel insecte.

"Ce sont de belles fleurs en tout cas. Tu penses qu'elles pourraient avoir quels effets dans tes potions ? En tout cas je peux te dire qu'elles ont l'air magiques, et je veux dire bien magique."

Soudainement, le camp commençait à s'agiter. Pas le temps pour elle d'avoir une réponse, son instinct militaire prenait immédiatement le dessus. Elle se levait et s'emparait de son katana en regardant Zärfell.

"On ferait mieux d'aller voir."

La situation était tendue, c'était palpable. Les étrangers n'avaient l'air pas commode du tout, et même prêt à s'entre-tuer avec les soldats de l'Empire. Mikasa observait le sorte de rituel des inconnus avec une certaine curiosité. Elle reconnaissait immédiatement les katanas jetaient aux flammes. C'était bien ceux des soldats de l'Empire disparut il y a quelques jours. De plus, elle reconnaissait dans leurs langues un mot singulier : Ban'téwonk. C'était le mot que ne cessait de répéter le perroquet dans la jungle, lors de leurs premières expéditions. Les Espers avaient une excellente mémoire (l'avantage de l'immortalité) et ainsi elle était sûre de son fait. Quand les hommes disparurent à nouveau dans la jungle, en laissant l'un des leurs ici, elle se retourna vers Zärfell.

"Ils n'avaient pas l'air content."

Puis elle regardait l'autochtone. Son regarde se posa immédiatement sur la pointe de sa lance, qu'elle reconnaissait instantanément. Mikasa courait dans sa forge et récupérait sa pointe de lance, avant de sortir et de la comparer avec celle de l'inconnu. Elle appartenait à cette civilisation. Elle finit par revenir vers Zärfell.

"Bon, la bonne nouvelle, c'est que je peux affirmer que ce peuple a fait cette pointe de lance. La mauvaise par contre... C'est que je ne sais pas du tout ce qu'ils veulent.
- Comme tout le monde ici Mikasa."

L'Esper se retournait vers Ryoujô qui venait d'arriver dans la conversation.

"En tout cas ils ont secoués tout le camps. Les Officiers sont encore parties pour une nuit blanche." Précisait le soldat, étrangement très sérieux.

~ Le jeune homme écouta la journée de la jeune femme avant de rire avec elle, ravi de pouvoir bien se rassasier ce soir. Les anchois et les patates douces lui faisaient très envie ! Il était heureux que son amie ait préparé cela. Harmattan, elle, avait englouti son repas et somnolait tranquillement aux pieds de l'Esper et du Sylphe. Tandis que son amie commençait à regarder les fleurs qu'il avait cueillies, Zärfell sentit une drôle de nostalgie passer sur son coeur. Cela ne lui arrivait pas tout le temps, mais parfois oui, surtout depuis qu'il avait des enfants... Les terres pandoriennes lui manquaient un peu, tout comme le sable du désert, le bonheur d'écouter les histoires des anciens Wadji au coin du feu, le plaisir de raconter une histoire à ses enfants, de partir en forêt avec eux, le plaisir de rire avec Akane et de se balader avec elle... Il s'arrêta de manger et rêvassa un peu à tout cela. Ce furent les mots de Mikasa qui le tira de sa rêverie.

Il prêta aussitôt une oreille attentive à sa remarque. Alors elle aussi, elle avait ressenti la magie de ces fleurs ! Il ne s'était donc pas trompé ! Enfin, avec son niveau de magie, il était capable de ressentir la moindre petite trace magique, néanmoins, depuis son arrivée ici, il doutait un peu de tout et même de ses propres compétences par moment.

- Je vois, ta remarque me rassure Mikasa ! C'est vrai qu'elles sont jolies et, avec elles, j'espère pouvoir créer des potions de soin. On ne sait jamais quand une bataille peut avoir lui. Mais j'espère surtout créer des potions contre les douleurs et la fatigue. Avec tout le remue-ménage des constructions qu'il y a eu, les gens ont mal partout. Et puis, les expéditions et la situation actuelle épuisent tout le monde... J'espère donc pouvoir soulager un peu tout ce beau monde avec mes connaissances !

Soudain, l'agitation extérieure attira leur attention. Zärfell tourna la tête vers la source du bruit et attrapa aussitôt son bâton d'if d'une poigne ferme. Il acquiesça aux propos de l'Esper et ils sortirent sans attendre. La découverte du soir ne manqua pas de surprendre le jeune homme ! Il resta assez stoïque et attentif, néanmoins, on voyait l'étonnement luire dans ses yeux malgré son air sévère et grave. Il y avait donc bien une civilisation ici ! L'Erudit tenta de comprendre les mots qu'utilisait l'homme tatoué. Il remarqua le chiffre trois et le geste de brûler les katana. Au vu des actes, Zärfell se disait que ce qi avait dû être prononcé était soit un avertissement, soit une menace plus importante, comme un dernier avis avant passage à l'acte. De plus, la danse rituelle venant étayer son idée. Zärfell tenta d'écrire phonétiquement les mots qu'avait dit l'homme et dessina quelques éléments reconnaissables de cette civilisation : les vêtements, les tatouages, les décorations et les bijoux. C'était typiquement la tenue d'habitants de pays tropicaux, avec beaucoup de forêt et un bord de mer. Le Mage ne tenta rien d'autre jusqu'à ce qu'ils partirent en laissant l'un des leurs là. Voilà qui était bien singulier de laisser un des leurs là, planté comme un piqué !

Il regarda Mikasa et Ryoujô. Zärfell saisit la pointe de lance de son amie et la détailla.

- Bien vu Mikasa ! Mais en effet, on ne sait pas vraiment ce qu'ils nous veulent.

Le magicien fixa l'autre soldat. Puis, le trentenaire repensa à ce mot "Bantéwonk" ? Quelque chose comme ça ? Etait-ce un mot ou plusieurs mots ? "Ban té wonk" peut-être ? Hum... Son regard se porta alors sur les soldats de l'Empire qui essayai d'interagir sans succès avec l'étrange grand colosse au visage tatoué. Puis, Zärfell porta ses yeux vers les katana dans les flammes qui continuaient de brûler... Cette vision lui rappela la mort de Koyomi et des autres, lors de l'expédition où il avait rencontré Marie Higgs. Il se souvint qu'il avait ramené le sabre du soldat Koyomi à sa famille. Les larmes et le regard terriblement triste des proches du soldat... Alors, il agit comme par automatisme. Il s'approcha du feu. Les lames y rougeoyaient un peu. D'un petit geste délicat de bras et de main, il fit s'écarter doucement les flammes avec sa magie de vent, puis, il utilisa sa magie d'eau pour se protéger et saisir les épées pour les sortirent du feu. Il les déposa à côté du feu de camp. Le feu reprit alors ses droits quand la magie de vent cessa de faire effet sur lui. On entendit les braises crépiter et les flammes reprirent du poil de la bête après avoir été dérangées par le magicien. Accroupi, le jeune homme fixa ces lames abîmées qui refroidissaient. Où étaient leurs possesseurs ? A quoi cela rimait-il ? En pensant à la mort, il pensa sans trop comprendre pourquoi à la guerre... Il revit le sable, les cadavres cuisant sous un soleil de plomb désertique, il eut un relent de sang séché... Au final, il revit la guerre, oui? Décidément, il avait les idées bien sombres, ce soir ! Il fallait se remuer !

Il se redressa et regarda l'inconnu, avec son pagne et sa lance. Des gens avaient déjà essayé de se présenter et le colosse n'avait pas réagi. Le Sylphe tenta quand même d'interagir. Il s'avança avec son bâton dans une main et il posa l'autre sur son torse.

- Zärfell.

Puis, le magicien s'inclina un peu, comme on le faisait à Shoan. Après tout, autant présenter ses coutumes. L'inconnu n'avait pas l'air de beaucoup réagir, néanmoins, il prenait peut-être en considération ce qui se passait autour de lui. Puis, le magicien pointa du doigt le colosse et déclara :

- Bantéwonk ?

Il se souvint qu'après avoir prononcé ce mot et après un geste de bras, cet inconnu s'était approché. C'était peut-être son prénom, son nom ou le nom du lieu d'où il venait. Le nom d'une divinité peut-être. Il attendit de voir sa réaction.

Plus tard dans la nuit, Zärfell avait pris une décision : il irait demain tenter de voir s'il retrouvait ce singe étrange. Peut-être qu'il pourrait les conduire aux hommes et femmes de cette civilisation étrangère... Il regarda les sortes de pétunias qu'il avait cueillis et se dit que, cette nuit, il devait tenter de faire des potions. En même temps, son esprit lui déclara que, pour demain, il devait absolument tenter d'emmener Mikasa avec lui ! Il regarda par la fenêtre de sa chambre : la sentinelle n'avait, semble-t-il, pas bouger d'un pouce...

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L'étranger restait de marbre à toutes les tentatives d'interactions envers sa personne. Sa seule réaction fut quand Zärfell retira les armes du feu. Le géant le dévisagea immédiatement avant de planter sa lance dans le sol. Quand le jeune homme se présenta à lui et essaya de deviner son nom, il le pointa d'un doigt menaçant.

"Kut'ulu Aua Poka-Pawa. Ksartel Kut'ulu Aua Poka-Pawa."

Puis il frappa sur sa poitrine musclée. Un autre regard noir perça presque à travers l'âme du jeune homme, et il reprit sa lance et sa garde inflexible. Le silence s'installa à nouveau dans le campement. Les soldats se dévisagèrent, essayant de comprendre comment et pourquoi l'indigène avait accepté de répondre à Zärfell et pas aux autres. Les Officiers, dans leurs tentes, décidèrent de laisser deux hommes observer l'inconnu. Puis la nuit continua sur le camp, non sans inquiétudes.

Le lendemain au petit matin, l'homme n'était plus là. Les soldats disaient avoir réussi à le suivre dans la jungle quelques mètres, puis il avait disparut. Beaucoup se demandaient ce que cela pouvait bien signifier. Du côté des hautes-autorités, décision avait été prise d'essayer d'interagir plus profondément avec ces inconnus, et de lancer une expédition pour essayer de découvrir leur lieu de vie, et éventuellement, leurs intentions.

Un homme défilait entre les soldats, une pile de rouleaux dans les bras et un sac à dos tellement plein que l'on pourrait croire qu'il allait céder d'un instant à l'autre. Il questionnait tout le monde sur le comportement des indigènes, leurs façons de s'exprimer, leurs gestuelles, etc... Immanquablement, il finit par se présenter à la maison de Zärfell. Il frappait à la porte puis se présentait en s'inclinant.

"Sage Zärfell, je me présente, Takeyama Monotori. J'ai été ordonné par le Général d'établir les communications avec les indigènes de l'île."

Parmi les nombreux civils de l'expédition, Monotori -de son prénom- était le spécialiste en linguistique. Il avait une certaine réputation dans le métier, et était quasiment destiné à rejoindre la Cours Impériale à ce sujet. Cette expédition était d'ailleurs là pour prouver sa valeur, en qualité de dernière épreuve. C'était un personnage sympathique mais qui avait tendance à partir dans de grands monologues pour expliquer son point de vue.

"Alors, j'ai cru comprendre que vous étiez la seule personne avec qui l'indigène avait communiqué. Est-ce que vous vous souvenez de ce qu'il vous a dit ? Je sais que c'est difficile, mais presque tout le monde a une mémoire floue des mots énoncés hier."

~ Zärfell observa la réaction plutôt agressive – ou plus exactement fortement énergique et agacée – de l'étranger. Cependant, le jeune homme conserva tout son contrôle de soi. Il resta inflexible dans son attitude et paisible dans son regard tout en détaillant les gestes de l'homme tatoué. Il frappait la terre de sa grande lance et le menaçait de son doigt puissant. « Kut'ulu Aua Poka-Pawa » ? A la manière dont l'inconnu le répéta encore une fois, précédé d'un autre mot, il en déduisit que ce devait être son nom et peut-être que ce mot ou ces mots « ksartel » signifiait quelque chose comme « je m'appelle ». Cela fut en tout cas l'impression du magicien, d'autant plus quand celui qui semblait se nommer Kut'ulu Aua Poka-Pawa frappa son torse avec vigueur et puissance ! Peut-être que ce geste était, d'ailleurs, leur façon de se saluer, tout comme les Shoaniens s'inclinaient avec respect pour se saluer.

Le regard sombre qui suivit ce geste et ces mots firent frissonner le jeune homme en son for intérieur. Cet inconnu avait touché son âme et l'Erudit avait compris que les gens de cette tribu étaient des hommes et des femmes puissants et déterminés. Le Mage ne laissait néanmoins rien transparaître à l'extérieur, malgré le côté perçant du regard de cet inconnu qui avait réussi à le toucher... Zärfell s'inclina un peu une nouvelle fois après la déclaration de l'autochtone puis, à l'aide de sa magie d'eau pour se protéger, il saisit les lames de ses camarades dont il ne savait pas les noms et partit. Il salua d'un petit signe de la tête Mikasa et Ryoujô.

- Bonne nuit vous deux. Mikasa, je passe te voir demain.

Une fois dans sa chambre, le magicien déposa les lames refroidies sur un grand carré de tissu et il vida sa sacoche. Aussitôt, il alluma une petite lumière et commença à noter les mots qu'il avait entendu et tout ce qu'il avait pu observer ce soir, notamment la tenue et la stature du peuple local. Puis, il se mit à étudier les sortes de pétunias qu'il avait récolté. Alors que la nuit avançait, il s'essaya à la création de potion en mélangeant ces plantes de différents manières. Il les testa ensuite sur des mouches qu'il avait enfermé dans des bocaux et des plantes vertes basiques pour voir leur effet.

Zärfell Eriawyn a effectué 1 lancé(s) d'un D6 :: 6

Résultat lors du lancé de dé : 2

Le résultat ne fut pas fameux. Ni les mouches, ni les plantes ne réagirent. Semble-t-il ses premiers mélanges ne menaient à rien de fructueux... Il soupira bruyamment et s'adossa profondément dans sa chaise. Il se gratta les cheveux. Bon, demain, ce serait peut-être mieux. Harmattan dormait déjà à point fermé quand Zärfell, doucement, enfila une tenue plus décontractée pour la nuit et s'allongea de tout son long sur son lit. Le jeune homme s'emmitoufla dans son oreiller et remonta le drap jusque sur sa tête avant de s'endormir étonnamment assez vite, sûrement bien fatigué par toutes ces journées d'exploration.

Il fut réveillé dès les premières lueurs du jour. Sa nature matinale ne le perdait pas, qu'importe où il était. Le jeune homme se leva aussitôt. Après s'être débarbouillé et avoir fait sa petite gym et méditation du matin, le Mage s'habilla pour se rendre sans attendre chez Mikasa avec les katana des soldats disparus. Il savait que la jeune femme était déjà debout. Il avait appris à connaître son côté travailleur sans repos. En passant par là où s'était tenu hier celui qu'il croyait nommé Kut'ulu Aua Poka-Pawa, il se rendit compte que ce dernier était parti. Le jeune homme se gratta la tête en fixant le feu qui, la veille, illuminait encore la figure tatouée de l'homme musclé... Harmattan avait rejoint au pas de course Zärfell qui dépassa le feu de camp et déboula bien vite chez Mikasa en toquant à sa porte avant d'entrer. Il sourit et s'inclina un peu.

- Bonjour Mikasa. Bien dormi ? Quoi de neuf ? … Tiens, je t'apporte ça.

Il déposa les trois katana abîmés. Le Mage enchaîna sans attendre :

- Le métal n'est pas abîmé car je pense que le feu de la veille n'était pas assez chaud pour déformer les lames. Néanmoins, les manches sont assez endommagés. Je sais que c'est pas ta spécialité, mais est-ce que tu pourrais juste les reprendre pour les rendre un peu plus présentables ? J'avoue que j'aimerais bien que les familles de ces soldats puissent récupérer les katana de leurs proches. Est-ce que ça te gênerait ?

Il attendit sa réponse puis écouta ce qu'elle avait à dire si elle voulait discuter un peu avec lui. Effectivement, le jeune homme était aussi venu pour papoter un peu de bon matin. Il appréciait bien Mikasa et c'était un peu l'une des seules personnes – avec les Mages Arc-en-ciel – avec qui il aimait parler et à qui il aimait présenter ses découvertes.

Néanmoins, ils avaient tous les deux fort à faire et, malgré l'envie de lui proposer de partir en expédition avec lui dans la forêt aujourd'hui, notamment afin d'assouvir l'idée qu'il avait en tête, le Sylphe finit par lui souhaiter une bonne matinée et l'informer que, si elle avait besoin de lui, elle savait où le trouver – c'est-à-dire dans sa chambre-laboratoire. En quittant la forge, le jeune homme partit cueillir quelques fruits et boire un grand verre d'eau en guise de petit-déjeuner. Puis, il s'attabla dans la foulée à son immense bureau et commença à re-réfléchir sur des potions potentielles.... Il gribouilla plusieurs combines, tentant quelques opérations mentales selon ses connaissances afin de voir si cela pouvait marcher... Il tenta d'apprendre de ses erreurs de la veille... Harmattan était partie faire un petit tour dehors, comprenant que, ce matin, son maître allait sûrement se torturer les neurones dans tous les sens. Zärfell était tellement plongé dans ses réflexions qu'il n'entendit pas qu'on toquait à sa porte. Il sursauta légèrement quand l'homme se présenta.

Aussitôt, le magicien se retourna sur sa chaise et vit le dénommé Takeyama s'incliner et expliquer la raison de sa venue chez lui. Le jeune homme se leva et s'inclina en guise de réponse, laissant derrière lui en plan tout son travail. Le Sylphe avait un peu entendu parlé du linguiste, du moins, le nom de ce jeune homme ne lui était pas inconnu. Zärfell avait, de toute façon, une bonne mémoire.

- Bonjour Takeyama. Ravi de voir que les Officiers ont pris la décision de vous charger d'entrer en communication avec les locaux. Hum, concernant votre requête, oui, je me souviens des mots, attendez...

Il se mit à trifouiller dans ses carnets pour retrouver celui qu'il utilisait en ce moment. Le magicien le prit et l'ouvrit tout en reprenant la parole.

- On ne peut pas vraiment dire qu'il a communiqué avec moi, mais quand je me suis présenté, il m'a répondu quelque chose comme : Kut'ulu Aua Poka-Pawa. Ksartel Kut'ulu Aua Poka-Pawa. Voilà comment je l'ai écrit, bien sûr, c'est de la transcription phonétique, je n'ai aucune idée de comment ça s'écrit et comment ça se prononce exactement.

L'ensemble des mots formaient une sorte de pâtée que le jeune homme avait essayé de découper en fonction de l'intonation de l'autochtone. A côté, il y avait ses gribouillis d'explications et d'hypothèses possibles. Zärfell poursuivit :

- Au vu de notre échange, j'ai supposé que Kut'ulu Aua Poka-Pawa était son nom. Il s'est frappé le torse après l'avoir prononcé tandis que moi-même je m'étais précédemment incliné après avoir dit mon nom. Donc, je suppose que c'était sa manière à lui de se présenter et de saluer. Voilà, ce sont mes analyses.

Il passa ensuite une rapide main dans ses cheveux lisses avant de croiser les bras. Le Sylphe vit les parchemins du jeune homme... Se disant que Takeyama devait être « de la même espèce » que lui – soit, un fan de bouquins et un curieux de tout, pouvant passer des heures à analyser un sujet – le magicien lui fit part d'autres réflexions :

- Il n'était clairement pas content quand j'ai retiré les katana du feu. Cela l'a peut-être frustré car c'était sûrement un signe de protestation de la part des siens ou quelque chose comme ça. En tout cas, il avait vraiment envie que ces épées soient détruites. Néanmoins, il n'a pas cherché à m'agresser non plus, donc, je suppose qu'il a voulu me faire passer un message ou m'envoyer un avertissement, plutôt que de chercher frontalement l'affrontement par la provocation. De plus, j'imagine que ces tatouages doivent signifier quelque chose.

Il tourna les pages de son carnet pour lui montrer ses reproductions et ses écrits réflexifs. Puis, le magicien soupira.

- Qu'en pensez-vous Takeyama ? Vous avez des hypothèses ? Qu'allez-vous faire ? Les autres vous ont-ils livré des infos intéressantes ?

L'Erudit regarda droit dans les yeux le linguiste. Zärfell avait son habituel air sympathique qui donnait envie de lui faire confiance – avec son fameux discret sourire coincé sur ses lèvres – malgré un regard un peu fatigué, préoccupé et concentré. Il avait bien envie d'échanger avec Takeyama à propos de ses réflexions et des « récoltes » du jour auprès des différentes personnes qu'il avait consultées.

"Bonne nuit Zärfell, on se voit demain alors."

Répondit simplement Mikasa aux salutations de Zärfell. Ryoujô décidait de rester un peu avec elle et de discuter des souvenirs de l'armée en évoquant des situations similaires à celle qu'ils vivaient ce soir. L'Esper ne manquait pas de préciser qu'un tel évènement restait exceptionnel. L'Empire, et même Pandore tout entier, n'avait pas colonisé de nouvelles terres depuis des années. La plus récente était Ciiti, car les autres expéditions pour des terres plus sauvages, au Nord, avaient tout simplement étaient arrêtées après leurs retours. Elle avait entendu dire que là-bas, des reptiles haut comme des tours ou massif comme des chariots vivaient en totale harmonie avec les humains. Cela l'avait intrigué, des reptiles géants semblant être fascinants. Zärfell lui en avait parlé pendant le voyage sur les mers, et ces terres semblaient très hostiles aux nouveaux venus. Elle espérait qu'ici, les choses seraient différentes. En pensant à cela, elle avait dévisagé l'inconnu qui restait ici.

Pour l'instant, ça démarrer mal.

Le lendemain, Mikasa s'était réveillée avec le soleil. Et sans surprise, Zärfell avait fait de même, en témoigne sa présence dès le petit matin. Il lui présenta les katanas jetaient la veille au feu par les indigènes. Son explication la prit un peu au cœur. Il était quelqu'un qui avait beaucoup de respect pour les morts. Elle acceptait avec plaisir sa requête. De plus, cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas travaillé une vrai lame. Après qu'il soit partit, elle se mit immédiatement au travail.

Retroussant ses manches et les attachant dans le dos comme d'habitude, elle observait les dégâts fait à la lame et aux manches. Ces derniers étaient fait en peau de requin et le tissu avait succombé aux flammes. Cela allait être le principal vrai problème pour la réparation des katanas. Mais rien que l'Esper ne pouvait surmonter. Déjà son fourneau chauffait et les flammes s'élançaient jusqu'au plafond.

Cela lui avait prit toute la matinée et beaucoup d'effort, mais le travail était fait. Les lames étaient tout aussi belles qu'avant. Non sans fierté, Mikasa prenait les trois armes dans les bras et les apporter à la demeure de Zärfell.

"Zärfell, j'ai terminé de réparer les... Oh pardon."

Mikasa était un peu confuse d'interrompre la conversation, et visiblement la recherche, entre son ami et un autre homme.

"Désolée, je ne savais pas que tu recevais, je peux passer une autre fois."

Elle s'apprêtait déjà à faire demi-tour en s'inclinant pour s'excuser.

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Plein d'étoiles dans les yeux, Takeyama observait les notes et les informations de Zärfell, tout en prenant soin de noter le moindre de ses mots. Tout cela était des plus intéressants et nouveaux pour lui. Sur les feuilles, il y avait beaucoup de mots relié par des flèches dont il cherchait encore le sens.

"Ah oui, les tatouages ! J'y reviendrais plus tard, mais pour moi il est évident qu'ils sont liés à quelque chose. On m'a dit que tous les individus étaient tatoués sur la majorité du corps, et l'un d'eux jusqu'au visage. Ma première conclusion est que cela est lié à une forme de hiérarchie. Je serais curieux de savoir quels motifs étaient tatoués sur ces hommes. Les tatouages et leurs significations varient selon les cultures. Par exemple vous n'êtes pas sans savoir qu'à Shoan les tatouages appartiennent essentiellement aux criminels pour se distinguer du reste de la population ou aux femmes de certains clans pour exprimer leurs rangs ou leurs histoires. À Erimos les tatouages sont plus précis et complexes la fois, ils aident à se différencier parmi les diverses tribus nomades des Voyageurs. Ils servent aussi à démontrer un rang, les plus simplistes identifiants les chefs et les plus complexes leurs meilleurs guerriers. Je me demande à quoi ils peuvent servir pour les habitants de cette île ? Qui est tatoué chez eux, de toutes évidences nous n'avons vus que des hommes, peut-être que les femmes ne le sont que sur certaines parties du corps ; peut-être même que cela leur est strictement interdit et qu'une femme tatouée est une paria ; ou peut-être même que les hommes que nous avons vus hier sont eux-même les parias et agissent ainsi indépendamment sans répondre à la moindre hiérarchie d'un clan ou d'un village ; ils peuvent aussi être vue comme une protection divine, comme c'était le cas chez certains clans d'Awarennor avant l'avènement de la Royauté."

Le linguiste notait tout cela en même temps qu'il parlait, à un débit plutôt rapide.

"Bien bien, visiblement plusieurs mots sont revenus à leurs bouches depuis hier : Poka-Pawa et Aua. Difficile de trouver une traduction correcte dans un contexte aussi flou. Vous disiez ici qu'il avait utiliser le mot Ku... Permettez..." Il consulta les notes de Zärfell. "Ku'tulu avec vous. Bien, je vais mettre ce mot dans une autre catégorie, de ce que je vois à vos notes l'intonation est différente... Si seulement j'avais pu l'entendre de vive-voix, mais je n'étais pas levé avec le reste du camps quand ces étrangers sont intervenus, quelle honte et quel dommage. Vous avez aussi dis qu'il a utiliser le terme Ksartel. Ksartel... Je ne vois aucune similitude avec les autres mots, il doit appartenir à une famille différente que ceux déjà noté. Voyez-vous, j'ai remarqué que les mots utilisés étaient souvent court et liés entre eux d'une manière ou d'une autre. Je pense que cela démontre d'un alphabet limité, sûrement avec moins de lettres que le nôtre. Vous saviez que certains civilisations anciennes, comme les habitants d'Itza, n'avaient qu'une douzaine de lettres dans leur alphabet ? La parole chez ces derniers était d'ailleurs très limitées et l'on utilisait surtout l'écriture pour s'exprimer. Je crois qu'ici cet homme essayait peut-être de prononcer votre nom, mais le "Z" ne doit pas être dans leurs alphabets, c'est très intéressant. Comme le "F" d'ailleurs. Je m'avance peut-être évidemment, je ne peux rien déduire sans en avoir une preuve formelle. Ce que vous me dites sur sa gestuelle est aussi très intéressant. Je peux en conclure moi aussi deux choses : soit il s'est présenté à vous, soit il vous a menacé. S'il s'est présenté à vous c'est excellent, car cela démontre que nous pouvons au moins établir un lien par la gestuelle afin de nous faire comprendre. Mais dans le cas contraire il nous faudra faire preuve de prudence car il faudra revoir toutes notre gestuelle. Cela se sait déjà, certains signes et comportement physique sont reçu différemment en fonction des civilisations. Par exemple éternuer est perçu différemment à Tonel qu'à Mandrosa, à Mandrosa cela est bien évidemment signe de maladie, alors qu'à Tonel il est perçu que si l'on retient son éternuement on cache quelque chose. Cela tient de la superstition évidemment mais l'on ne peut pas exclure que ce peuple est très superticieux. J'espère d'ailleurs que votre geste de retirer les katanas du feu ne les a pas froissé et que..."

Takeyama se retourna quand Mikasa se présenta à eux. Il retient la jeune femme avec un sourire et un geste de bras.

"Non non bien au contraire, vous ne nous interrompez pas ! Au contraire au contraire, j'ai entendu dire que vous étiez une Esper ! Les Esper ont une excellente mémoire non ? Vous étiez avec Zärfell hier, vous allez pouvoir m'aider, grâce à vous deux, je vais faire d'une pierre deux coups. Dites moi, si les notes de Sage Zärfell sont justes, et également, pouvez-vous me préciser quelques mots supplémentaires qui auraient échappés à la mémoire de certains de mes compatriotes ?

~ Zärfell, sans bouger, observa Takeyama partir dans ses logorrhées. Il resta attentif, car lui aussi, cela lui arrivait. Le linguiste n'avait pas tord en ce qui concernait les tatouages. Quand il évoqua ceux d'Erimos, des images de ses amis et de sa tribu lui revinrent. Il s'en dessinait lui-même de temps en temps sur ses bras. Toutes les hypothèses que Takeyama avançaient été potentiellement justes. Zärfell avait plus tendance à croire que c'était soit des tatouages liés à un rang ou une fonction, soit des tatouages symboliques ou rituels qui étaient peut-être là pour apporter du courage, de la force ou d'autres valeurs positives. Peut-être l'hypothèse d'un rapport à une divinité était-elle possible aussi. Le Mage observa le jeune homme regardait le carnet dans lequel il prenait ses notes et il continua d'écouter le linguiste quand il se mit à parler de la langue de ces autochtones. En matière de langue, Zärfell était un peu moins qualifié. Bien qu'il avait suffisamment d'esprit analytique pour décrypter des langages, comme il avait pu le faire avec des langues anciennes, il était cependant beaucoup moins talentueux dans ce domaine que dans celui de la médecine, des potions ou de la magie.

Son analyse de ksartel lui parut très plausible. Le magicien se gratta la tête et se dit qu'en effet, ces étrangers ne possédaient certainement pas les mêmes sons que dans leur langue... Zärfell resta calme pendant que Takeyama partait encore dans un long discours analytique. Ils furent interrompus par l'arrivée de Mikasa. Il lui sourit quand il vit son amie rentrer avec les lames réparées. Cependant, le jeune homme fut pris de court et ce fut Takeyama qui aborda avant lui la jeune femme... Bien sûr, ce fut pour la questionner sur les habitants de la région. Avant que Mikasa ne puisse répondre aux questions du linguiste, Zärfell se permit d'avancer jusqu'à l'Esper.

- Oui, tu peux rester Mikasa, il n'y a aucun problème... Oh, ce sont les lames que je t'avais confiées.

Il les observa et étira un sourire touché et reconnaissant.

- Merci beaucoup Mikasa, c'est un travail exceptionnel... Désolé de t'avoir demandé ça... J'avoue espérer que ces soldats soient encore en vie, mais au moins, s'ils ne le sont plus et qu'on ne peut retrouver leur corps, leurs familles pourront avoir leurs épées... Mourir pendant une guerre est une chose, mais mourir dans une expédition où tout est inconnu en est une autre.

Le père de famille regarda l'Esper droit dans les yeux, d'un regard amical, en signe de remerciement. Il se tourna alors vers Takeyama.

- Ah, excusez-moi Takeyama, je vous laisse reprendre la suite de vos investigations concernant les autochtones d'hier.

Il se recula un peu pour laisser de nouveau l'espace libre à la discussion. Harmattan, quant à elle, était revenue de sa balade et était discrètement rentrée pour s'asseoir aux côtés de son camarade. Elle pencha légèrement la tête en voyant ce drôle de bonhomme avec ses parchemins et, à distance, elle renifla l'inconnu pour s'imprégner de son odeur. Le jeune homme tenta de se faire discret. Pendant que les deux personnes dans sa chambre discutaient, il se perdit un peu dans ses réflexions concernant les potions qu'il essayait d'élaborer et concernant les indigènes de la veille ainsi que ce mystérieux singe qu'il n'avait pas revu depuis sa première rencontre avec lui... Il écouta un peu ce que disait l'Esper bien que son esprit voguait en même temps ailleurs.

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